Suite à l’amendement à l’article 45 du PLFSS 2022 déposé lors de son examen à l’Assemblée nationale et prévoyant d’encadrer les dispositifs de tiers-payant mis en place par les OCAM sur le 100% Santé, nous ne pouvons que constater une désinformation orchestrée.
Comme le gouvernement, nous ne pouvons que constater le peu de goût dont semble faire preuve une majorité d’opticiens sur le terrain pour accompagner la vente d’équipements 100% Santé, qui représente moins de 3% des ventes (hors assurés CSS) depuis la mise en place de la réforme dans le domaine de l’optique. L’argument selon lequel la mise-à-plat du tiers-payant existant sur cette classe de lunettes serait la mesure la plus à même d’assurer sa plus large diffusion porte en soi une analyse erronée qui nous oblige à réagir pour rétablir des
chiffres objectivés afin d’éclairer la décision publique et celle du législateur.
Rétablir les chiffres réels : le tiers-payant est déjà presque systématique en optique, en particulier s’agissant des équipements 100% Santé
En réalité 95% au moins des contrats complémentaires santé (les contrats dits « responsables » représentent la quasi intégralité des contrats existant en France sur le marché de la complémentaire santé) proposent déjà un tiers-payant intégral sur le 100% Santé, mais en laissant aux professionnels la possibilité d’y recourir ou pas. En l’occurrence, dans le domaine de l’optique, le recours au tiers payant est historiquement largement répandu, et encore davantage s’agissant des équipements optiques 100% Santé dont nous pouvons affirmer que les flux sont traités à plus de 90% par tiers-payant. Si certains achats d’optique de vue sont effectués sans tiers-payant sur le panier sans Reste à charge du 100% Santé, ce n’est en aucune manière du fait des OCAM ou de leurs opérateurs.
Développement du 100% Santé en optique : la mesure prioritaire ne repose certainement pas sur le remplacement d’un dispositif de tiers-payant en place et qui fonctionne
De ce que nous venons de rappeler, le constat objectif se révèle être que les opticiens ne vendent pas d’équipements 100% Santé, alors qu’ils pratiquent très majoritairement le tiers-payant. Inversement les audioprothésistes, et surtout les chirurgiens-dentistes, pratiquent encore malheureusement beaucoup moins fréquemment le tiers-payant… tout en se révélant beaucoup plus engagés dans les paniers sans Reste à Charge du 100% Santé (40% des équipements vendus relèvent du 100% Santé dans le domaine des audioprothèses et 50% dans celui du dentaire). On voit que le succès du 100% Santé n’est pas d’abord et avant tout corrélé à la possibilité d’y recourir via le tiers-payant, et la volonté acharnée de certains de n’intervenir que sur les modalités de ce dispositif de prise en charge pour participer à une plus large diffusion la réforme témoigne de l’instrumentalisation politique qu’il opère de cette question technique.
Il s’agit au passage, par la modification des circuits d’enregistrement et de validation des prises-en-charge, d’empêcher les complémentaires santé et les réseaux de soins d’avoir accès à des informations essentielles sur les équipements qu’ils remboursent pour assurer l’ensemble de leurs missions légitimes en tant que financeurs des soins, attendues à la fois par leurs assurés et leurs autorités de tutelle. Les contrôles qualité et de lutte anti-fraude effectués par les assureurs santé et les plateformes de santé sur les actes facturés par les professionnels de santé à leurs assurés ne sont ni superflus, ni excessifs mais relèvent simplement du socle du métier d’assureur santé pour garantir la plus juste utilisation des fonds mutualisés destinés à financer les soins des assurés… !
Les intentions cachées que doivent connaître les législateurs et le gouvernement : empêcher la légitime contrôle par les OCAM de la dépense qu’ils financent très majoritairement
On voit ainsi la mise en place de la réforme du 100% Santé être utilisée pour priver les OCAM et les réseaux de soins des informations véhiculées dans les flux de tiers-payant qu’ils opèrent en les remplaçant par un autre nouveau dispositif de tiers-payant « 100% Sécurité Sociale », qui a toutes les chances de se révéler « 100% aveugle » pour les payeurs principaux que sont les complémentaires santé. Comme on l’a vu, les ventes d’équipements 100% Santé n’en progresseront pas pour autant… mais le niveau de fraudes et d’abus risque lui d’être considérablement augmenté sans que nous n’ayons plus aucun moyen de le détecter et de lutter efficacement contre.
Les Sénateurs et Sénatrices ne s’y sont pas trompés en venant d’adopter, lors de l’examen du PLFSS, un amendement de suppression de la disposition adoptée à l’Assemblée nationale et visant à encadrer ce tiers-payant mis en œuvre par les OCAM sur le 100% Santé.
L’Association des Plateformes Santé appelle donc les parlementaires des deux assemblées, dans la suite des délibérations sur ce point du PLFSS 2022, à reconsidérer le sujet avec le plus d’objectivité possible pour éviter que les soient atteints les desseins peu avouables de paralysie des OCAM dans leur mission de contrôle légitime, en tant que payeurs de loin majoritaires des dépenses optiques.
Cet article a été publié par la Rédaction le