Les arnaques qui visent les personnes âgées connaissent une transformation inquiétante. Longtemps cantonnés aux faux agents EDF, aux démarchages téléphoniques frauduleux ou aux arnaques au chèque, les stratagèmes des escrocs se sont enrichis des dernières technologies. L’intelligence artificielle, et en particulier les outils de génération de voix ou d’images, ouvre de nouvelles perspectives aux fraudeurs, rendant leurs attaques plus réalistes que jamais.

Les seniors, plus vulnérables face aux arnaques
Face à la sophistication des arnaques, les seniors apparaissent comme une cible privilégiée. L’isolement social, la fragilité économique et la fracture numérique les exposent davantage. Selon les données disponibles, plus de 65 % des personnes de plus de 75 ans rencontrent encore des difficultés avec le numérique. Une vulnérabilité qui attire la convoitise des escrocs, toujours prompts à exploiter la faiblesse ou la méfiance limitée d’autrui.
Les nouvelles arnaques numériques : quand l’IA devient une arme
Ces dernières années, les arnaques dites « classiques » se réinventent grâce à l’intelligence artificielle.
1. Les appels deepfake : la « fausse détresse » d’un proche
Les deepfakes vocaux et vidéo sont aujourd’hui la menace la plus spectaculaire. En quelques secondes, un escroc peut imiter la voix d’un petit-fils ou même son visage lors d’un appel vidéo. La victime, persuadée d’échanger avec un proche en détresse, procède à un virement sans réfléchir. Ce scénario reprend l’ancienne « arnaque au petit-fils », mais il est désormais presque impossible à déceler à l’œil nu.
Bons réflexes :
- Raccrocher et rappeler directement le proche au numéro habituel.
- Mettre en place un code secret familial pour valider toute urgence réelle.
- Ne jamais agir sous la pression d’un appel imprévu.
2. Les faux conseillers IA : chatbots et faux sites
Derrière un site imitant à la perfection l’Assurance Maladie ou une banque se cache un chatbot frauduleux qui guide pas à pas la victime. Ces robots conversationnels, capables de répondre comme un véritable conseiller, inspirent une fausse confiance. Pourtant, les administrations ne sollicitent jamais d’informations personnelles ou bancaires par messagerie instantanée : le seul site officiel pour les démarches reste service-public.fr.
Bons réflexes :
- Vérifier l’adresse du site (seul le site service-public.fr est officiel).
- Ne jamais transmettre de données bancaires via un formulaire non sollicité.
- Se méfier des urgences artificielles (« offre limitée », « suppression de dossier »).
3. L’arnaque au support technique
Les arnaques au support technique restent elles aussi très répandues. De fausses alertes de piratage surgissent sur l’écran de l’ordinateur ou de la tablette. Un numéro d’assistance apparaît, incitant à appeler pour « débloquer » l’appareil. Au bout du fil, un faux technicien prend la main à distance et en profite pour subtiliser données et argent.
Bons réflexes :
- Ne jamais appeler le numéro affiché dans une alerte.
- Ne jamais autoriser un tiers inconnu à accéder à son ordinateur.
- En cas de doute, appeler le service client officiel via les coordonnées de la facture.
4. Les boomer-trap ou « pièges à seniors »
Les boomer traps désignent des images générées par intelligence artificielle (IA) qui inondent les réseaux sociaux, notamment Facebook, dans le but de manipuler émotionnellement les internautes, en particulier les personnes âgées. Ces images, souvent attendrissantes ou choquantes, sont conçues pour susciter des réactions telles que des « j’aime », des partages ou des commentaires. Les escrocs utilisent ces interactions pour identifier des cibles potentielles pour des arnaques plus élaborées, telles que des faux concours, des loteries frauduleuses ou des escroqueries sentimentales.
Bons réflexes :
- Vérifier l’origine de l’image : Les images générées par IA présentent souvent des anomalies subtiles, comme des mains mal formées, des visages flous ou une symétrie étrange. Si l’image semble trop parfaite ou irréaliste, il est probable qu’elle ait été créée par IA.
- Se méfier des publications émotionnelles : Les escrocs exploitent des thèmes émotionnels forts, tels que l’abandon, la pauvreté ou la souffrance, pour manipuler les internautes.
- Ne pas interagir avec des contenus suspects : Cliquer sur « j’aime », partager ou commenter une publication peut exposer votre profil à des arnaques ultérieures.
- Sensibiliser les proches
5. Les fausses primes sociales ou retraites
Enfin, les fraudeurs exploitent le contexte économique en multipliant les fausses primes sociales ou retraites. Des courriels parfaitement rédigés annoncent un recalcul de pension ou une aide exceptionnelle. Le formulaire à remplir, soi-disant officiel, exige RIB et numéro de Sécurité sociale.
Bons réflexes :
- L’État ne demande jamais de paiement pour verser une aide.
- Passer uniquement par son espace personnel (Ameli, Assurance Retraite).
- Solliciter un proche en cas de doute.

Les arnaques en ligne traditionnelles : un danger toujours présent
L’usage d’internet par les seniors augmente d’année en année. En effet, 86% des 60-74 ans se connectent régulièrement, mais 67% des plus de 75 ans souffrent d’illectronisme. Ce paradoxe, plus connectés mais peu formés, crée un terreau propice aux escroqueries. Les principales fraudes numériques recensées entre 2024 et 2025 sont :
- Le phishing (ou hameçonnage) : représentant un tiers des signalements enregistrés sur la plateforme cybermalveillance.gouv.fr en 2024, cette arnaque consiste à usurper l’identité d’un organisme officiel (banque, impôt, ou même un proche) via un mail ou un sms vous invitant à cliquer sur un lien. Ce lien mène vers un site frauduleux destiné à collecter mots de passe et données bancaires.
- Le piratage de compte, représentant 1 signalement sur 5, connaît une recrudescence. Une fois en possession de l’adresse mail ou du profil social de la victime, l’escroc contacte les proches de la victime en se faisant passer pour elle afin de demander de l’aide financière en urgence.
- Les escroqueries sentimentales : ciblant les personnes seules par le biais de sites de rencontre ou réseau social, l’escroc engage la conversation, parfois sur plusieurs mois, avant de réclamer de l’argent pour un motif urgent : frais médicaux, voyage, investissement.
Les bons réflexes à adopter face aux arnaques visant les seniors
La prévention reste la meilleure défense. Quelques règles simples permettent d’éviter la majorité des arnaques :
- Utiliser des mots de passe longs et complexes, différents pour chaque compte
- Ne jamais cliquer sur un lien suspect ou ouvrir de pièce jointe d’un expéditeur inconnu
- Installer un antivirus et activer les mises à jour automatiques
- Toujours retirer sa carte bancaire d’un site après avoir passé commande
- Vérifier la présence du cadenas « https » avant tout achat en ligne
- Consulter les avis et la réputation d’un site avant de procéder à quelconque paiement
- Contrôler régulièrement ses relevés bancaires
- Ne jamais céder à la pression d’une urgence supposée
- Demander conseil à sa famille ou proche au moindre doute

Que faire en cas d’arnaque ?
Lorsqu’une personne âgée est victime d’une escroquerie, la rapidité de réaction est essentielle.
- Contacter sa banque immédiatement pour bloquer tout virement suspect
- Changer ses mots de passe en cas de piratage
- Déposer plainte auprès de la gendarmerie ou du commissariat
- Signaler l’arnaque sur les plateformes officielles :
- Pharos (portail officiel des signalements des contenus illicites sur internet)
- Signal Spam pour les emails et sms frauduleux
- Contacter Info Escroqueries au 0 805 805 817 (numéro vert, appel gratuit)
La vigilance est l’affaire de tous
Les arnaques évoluent mais leur principe reste immuable : profiter de la confiance ou de la peur pour obtenir argent et données personnelles. En 2025, l’intelligence artificielle a renforcé leur crédibilité, mais l’information et la prévention demeurent les meilleures armes.
Informer les seniors, accompagner ceux qui sont isolés et renforcer la vigilance collective (familles, associations, institutions), constitue le moyen le plus efficace de protéger les plus vulnérables.
Cet article a été publié par la Rédaction le



