La Haute Autorité de santé (HAS) a rendu, mardi 9 septembre, un avis très attendu sur le Leqembi, traitement développé par les laboratoires Biogen (États-Unis) et Eisai (Japon) pour ralentir la progression de la maladie d’Alzheimer. L’institution a choisi de refuser une procédure d’« accès précoce », qui aurait permis un remboursement immédiat du médicament, invoquant une efficacité jugée limitée et des risques importants pour les patients.

- La Haute Autorité de santé (HAS) refuse l’accès précoce au Leqembi, traitement de Biogen et Eisai contre Alzheimer, invoquant une efficacité trop limitée et des risques importants.
- Le médicament, déjà autorisé aux États-Unis, au Japon et dans l’UE, agit sur les plaques amyloïdes et ralentirait le déclin cognitif de 27 % sur 18 mois, soit quelques mois d’autonomie gagnés.
- La HAS juge ces bénéfices « non cliniquement pertinents » et insuffisants pour justifier un remboursement accéléré en France.
- Les effets secondaires graves (œdèmes cérébraux, hémorragies intracrâniennes) nécessitent un suivi strict par IRM, rendant la diffusion complexe.
- Le refus n’est pas définitif : une réévaluation dans le cadre classique pourrait aboutir à un remboursement encadré après négociation avec l’Assurance maladie.

Le Leqembi : Un espoir scientifique qui divise
Le Leqembi, dont la substance active est le lécanémab, agit en ciblant les plaques amyloïdes présentes dans le cerveau, considérées comme l’un des marqueurs majeurs de la maladie d’Alzheimer. Selon les résultats d’essais cliniques, le traitement permet de ralentir le déclin cognitif d’environ 27 % sur une période de 18 mois, soit un gain évalué à quelques mois supplémentaires d’autonomie.
Pour une partie du corps médical, il s’agit d’une avancée significative après des décennies de recherche infructueuse. Aux États-Unis, au Japon et plus récemment dans l’Union européenne, le Leqembi a déjà obtenu une autorisation de mise sur le marché, mais toujours assortie de conditions strictes d’utilisation, limitées aux patients au tout début de la maladie.

Des bénéfices jugés « trop modestes »
En France, la HAS se montre bien plus prudente. Sa commission de transparence estime que le médicament présente « une efficacité modeste, considérée comme non cliniquement pertinente » et qu’il n’est pas en mesure de répondre à un besoin médical insuffisamment couvert. En d’autres termes, les améliorations constatées seraient trop faibles pour justifier une diffusion accélérée auprès des malades.
Pierre Cochat, président de la commission, reconnaît la déception suscitée par cette décision : « On sait bien à quel point tout le monde avait beaucoup d’espoir. (ndlr : les bénéfices constatés) restent très insuffisants par rapport à ce qu’on attendait. »
Des effets secondaires préoccupants
Au-delà de l’efficacité limitée, c’est surtout le profil de tolérance du Leqembi qui inquiète. Les essais cliniques ont mis en évidence des effets indésirables graves : œdèmes cérébraux, hémorragies intracrâniennes, parfois mortels. Ces complications surviennent dès les premières injections et nécessitent un suivi médical strict, avec des IRM régulières.
La HAS estime que ces contraintes, lourdes pour les patients comme pour le système de soins, constituent un frein supplémentaire à une diffusion rapide du médicament.

Entre attentes des patients et prudence des autorités
Les associations de patients et de proches, très mobilisées, militent depuis des mois pour un accès élargi au Leqembi. Pour beaucoup de familles, quelques mois de ralentissement de la maladie représentent une différence significative au quotidien. Un sondage mené par la Fondation Vaincre Alzheimer indiquait que près de la moitié des personnes interrogées accepteraient ce traitement malgré les risques.
Mais du côté des experts, les avis demeurent partagés. Certains y voient un premier pas vers une nouvelle génération de thérapies, d’autres dénoncent un « espoir illusoire » qui détourne la recherche de pistes alternatives, en misant trop exclusivement sur la réduction des plaques amyloïdes.
Leqembi : Pas de remboursement immédiat, mais une issue encore possible
Le refus de la HAS ne signifie pas un rejet définitif. L’institution précise que la question pourra être réexaminée dans le cadre d’une procédure de droit commun, impliquant des négociations tarifaires entre les laboratoires et l’Assurance maladie. Cette évaluation pourrait déboucher, à terme, sur un remboursement partiel ou encadré.
En attendant, la France se distingue de certains de ses voisins européens comme l’Allemagne ou l’Autriche, qui autorisent déjà le traitement sous conditions. Pour les 900 000 personnes atteintes d’Alzheimer en France, la décision constitue un revers. Mais elle illustre aussi la difficulté persistante de trouver un équilibre entre innovation thérapeutique et sécurité des patients.
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