La filière des soins à domicile face à une équation économique compliquée

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Xerfi vient de publier une étude sous le titre : « Les PSAD face à la montée des risques – Flambée des coûts, accréditation, percée des pharmacies : quels leviers et perspectives d’ici 2024 ? » . À cette occasion trois questions ont été posé à Cathy Alegria, directrice d’études.

Comment les prestataires de soins à domicile abordent-ils l’avenir ? 

Malgré les 700 millions d’euros de baisses tarifaires imposées depuis 2010 et la coûteuse adaptation au télésuivi de l’apnée du sommeil, les prestataires de soins à domicile (PSAD) ont réussi à maintenir leurs marges dans la période pré-Covid. Gonflées par l’explosion des volumes et la réduction des coûts liée au repli du nombre de visites à domicile, leurs marges ont ensuite atteint des sommets au plus fort de la crise sanitaire. Un net décrochage est toutefois à prévoir. La donne est en effet en train de changer. D’abord, les coûts dérapent (carburant, prix des dispositifs médicaux, forfaitisation accrue des interventions…). Sans oublier que les baisses tarifaires vont se poursuivre (comme par exemple pour la pression positive continue ou PPC, prestation phare des PSAD). Surtout, les prestataires vont peiner à gagner en efficience alors que la plupart d’entre eux ont déjà « industrialisé » leur activité face aux mesures des pouvoirs publics pour contenir les dépenses de santé. Ils ne pourront pas non plus miser sur la course à la taille avec l’arrivée à terme du mouvement de consolidation du secteur. En somme, l’équation économique se complique pour les prestataires de soins à domicile. En dépit de cette dégradation inéluctable, les marges de la profession resteront confortables avec un taux d’excédent brut d’exploitation de 19% et un taux de résultat net de 8% en 2024, d’après nos calculs. Le chiffre d’affaires de la profession augmentera lui au rythme de 3% par an en moyenne d’ici 2024 par rapport aux 3,1 milliards engrangés en 2021.  ­ ­ ­

Cathy Alegria, directrice d’études

Dans ce contexte, le jeu concurrentiel du secteur ne devrait pas franchement évoluer ?

Compte tenu des options stratégiques à la disposition des acteurs, des nouvelles baisses de prix et des faibles possibilités de consolidation, aucun bouleversement d’ampleur ne devrait intervenir dans le jeu concurrentiel. Toutefois, certains consolidateurs (Bastide, Santé Cie, La Poste…)  mais aussi Damartex devraient sans doute mettre la main sur quelques petites sociétés (moins de cinq millions d’euros de chiffre d’affaires). Ces dernières risquent en effet d’être fragilisées par le durcissement des mesures réglementaires et le contexte inflationniste. En réalité, ce sont les officines qu’il convient de surveiller. Historiquement, les pharmacies évoluent en marge du marché des PSAD. Mais elles ont récemment gagné une importante bataille en 2021, en étant retenu par le CEPS pour accompagner les patients sous pompe à insuline Diabeloop, en lieu et place des prestataires de soins à domicile. En clair, cette incursion pourrait bien se poursuivre pour d’autres prises en charge alors que les pharmacies dépendent de plus en plus de leur capacité à développer et à faire fructifier leurs missions de santé autour de nouvelles activités. Cette percée dans la filière de soins a été permise par la mise au point d’un modèle d’affaires novateur (éclatement du forfait LPPR, recours intensif à la technologie, association des pharmaciens avec TIMKL, une société soutenue par le laboratoire pharmaceutique Roche). Cette arrivée des officines dans le médico-technique n’est pas susceptible de remettre en cause la place des PSAD tant le suivi des patients sous Diabeloop n’est qu’une goutte d’eau dans l’ensemble des prestations qu’ils assurent. Il faut néanmoins surveiller de près cette entrée des pharmacies qui ont une certaine légitimité auprès des autorités de tutelle en raison de leurs atouts (maillage territorial, certaine caution médicale….). Malgré la diversité des intervenants (PSAD privés et associatifs, pharmacies et structures d’HAD), Air Liquide, Isis, Santé Cie et SOS Oxygène trustent aujourd’hui plus de la moitié du marché en valeur.  ­

Cathy Alegria, directrice d’études

Quelles sont les principales stratégies de croissance des prestataires ?

A l’instar de bon nombre d’entreprises de santé, les PSAD misent sur le numérique comme les solutions de télémédecine, les dispositifs connectés et, plus globalement, les systèmes d’information. Avec ce virage technologique, ils cherchent à améliorer leurs prises en charge et à gagner en efficience. Certains se diversifient même dans la collecte et le traitement de données, à l’image d’AGIR à Dom qui a racheté OpenHealth. En matière de télésurveillance, les PSAD s’appuient sur un nombre limité de solutions conçues par des industriels. Seuls les grands groupes La Poste et Air Liquide mènent des stratégies intégrées plus ambitieuses. Parallèlement, certains prestataires n’hésitent pas à sortir du champ d’intervention du médico-technique classique en investissant le maintien à domicile ou les niches de la stomathérapie, de l’urologie et de la cicatrisation des plaies chroniques (escarre, ulcère…) ou aigües (post-opératoire, traumatique…). L’opérateur Santé Cie est même allé plus loin en se positionnant dans la dialyse et la gestion de maisons de santé de proximité. De façon générale, les acteurs du marché cherchent à s’intégrer dans l’écosystème des patients en nouant des liens avec les professionnels ou les structures présentes dans le parcours  de soins.

Cathy Alegria, directrice d’études

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Cet article a été publié par la Rédaction le

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