L’isolement social des 11 millions d’aidant.es est aujourd’hui une réalité, amplifiée par la crise sanitaire actuelle. Manque d’accompagnement, de reconnaissance, de visibilité, les raisons sont nombreuses pour expliquer cet isolement qui conduit à une véritable rupture sociale.
Le Collectif Je t’Aide publie son 4ème plaidoyer, dont le thème de l’isolement social a été choisi par les aidants via une consultation nationale. Il soumet 10 propositions aux pouvoirs publics qui s’inscrivent dans la mise en œuvre de la stratégie nationale « Agir pour les aidants » dont le deuxième comité de suivi s’est tenu le 5 Mai dernier.
Un isolement exacerbé et amplifié depuis la crise sanitaire
L’isolement social s’accroît dans notre société et alors qu’il ne concernait qu’une minorité d’individus, il est devenu la norme depuis les confinements successifs. Les aidants sont particulièrement concernés par cette situation. Ce plaidoyer vise à mettre en lumière cet isolement et décrypter ses causes et ses conséquences. Le Collectif Je t’Aide soumet 10 préconisations aux pouvoirs publics pour prévenir et lutter contre l’isolement des aidants.
Si tous les aidant.es ne se retrouvent pas dans des situations difficiles et complexes, la moitié se sent seule et non soutenue moralement. Ils se retrouvent souvent pris dans le « cercle vicieux de l’isolement ». Ces réactions en chaîne et ces dynamiques induisent le retrait progressif des aidant.es de la vie sociale et de la vie de la cité, voire à une marginalisation. Déficit de protection et déni de reconnaissance expliquent leur isolement.
Un isolement dû à un déficit de protection et un déni de reconnaissance
“Je me sens isolée car je n’ai aucun contact social en étant à la maison avec mon fils” Marie. Le déficit de protection se caractérise par un manque d’accompagnement des aidants qui effectuent, souvent seuls, un travail invisible et gratuit. Aider un proche nécessite beaucoup de temps et d’attention dans la durée, entraîne des frais financiers et a des impacts sur la vie professionnelle. Les temps de socialisation et pour soi s’en trouvent alors réduits.
Le déficit de reconnaissance se manifeste par l’incompréhension de l’entourage de ce rôle d’aidant et un déficit de visibilité dans la société. Si aujourd’hui, 48% des Français connaissent le terme “aidant”, ils ne sont que 38% à en connaître véritablement la définition.
De nombreux freins à la rupture de l’isolement des aidants
« Bien souvent dans le quotidien, avec tous les nombreux rôles à endosser pour aider au mieux, je me dis : Si je ne le fais pas moi, qui le fera ? » Nadine. Les aidants, et en particulier les femmes, sont assigné.es culturellement et institutionnellement dans ce rôle d’aidant, encore considéré comme “naturel” et relevant de la sphère domestique et privée.
Ces croyances sociétales et choix politiques nourrissent des sentiments de culpabilité, d’auto-censure, de conflit de loyauté chez les aidant.es qui n’osent pas ou peu demander de l’aide. Les conséquences de l’isolement des aidant.es sont importantes : risques pour leur santé, prises en charge tardives, coûts sociaux importants pour la société, …
Le Collectif demande au gouvernement des mesures pour rompre l’isolement social des aidants
Proposition 1
Conduire une étude nationale menée par la DRESS pour mettre à jour et compléter les données de connaissance et de repérage des aidant.es en France.
Proposition 2
Mener une campagne de sensibilisation nationale lors de la Journée Nationale des Aidant.es (JNA) le 6 octobre, financée et diffusée par le Ministère des Solidarités et de la Santé, sur le modèle des grandes campagnes
de prévention.
Proposition 3
Former tous les professionnels en contact avec des aidant.es, (secteur santé, social, médico-social, Éducation Nationale, médecine du travail, RH ou séjours de vacances) au repérage des aidants et à leur orientation vers des structures adaptées d’informations et d’accompagnement.
Proposition 4
Associer le Collectif Je t’Aide à la création du cahier des charges du label de lieux d’accueil des aidants, proposé par le gouvernement. Cette labellisation devra valoriser les initiatives qui prennent en compte l’ensemble des aidants et décloisonner les volets handicap et perte d’autonomie, et les structures qui informent déjà les aidants.
Proposition 5
Soutenir financièrement les associations et fondations qui accompagnent et soutiennent les aidants dans une démarche globale et de qualité.
Proposition 6
Former les professionnels de l’emploi, du recrutement et de la formation professionnelle au repérage et à l’identification des aidant.es pour qu’ils soient en mesure de les accompagner dans la mise en valeur des compétences acquises durant l’aidance et dans le maintien et le retour à l’emploi.
Proposition 7
Étendre le congé de proche aidant aux aidants s’occupant d’un proche évalué en GIR 4, atteint d’affection longue durée et d’un proche en situation de handicap inférieur à 80%. Étendre la durée de ce congé au-delà de 3 mois, augmenter son indemnisation et permettre un congé par proche accompagné pour les aidants qui s’occupent de plusieurs proches.
Proposition 8
Développer, diversifier et rendre accessibles géographiquement et financièrement les dispositifs de répit. Développer le maillage des plateformes de répit, tous motifs d’aide confondus, ainsi que leurs financements. Y inclure le répit de longue durée y compris au domicile et les dispositifs de répit non institutionnels.
Proposition 9
Poursuivre l’accessibilité universelle des lieux publics, de loisirs et de citoyenneté aux aidants et à leurs proches et développer des solutions de mobilité plus souples, généralisées et moins coûteuses pour s’y rendre.
Proposition 10
Promouvoir les lieux de vacances et de loisirs inclusifs pour permettre à chacun de vivre en société et favoriser la rencontre et le changement de regard sur la maladie, le handicap, la dépendance et les fragilités. Former les professionnels de l’animation à l’accompagnement des aidants.
Cet article a été publié par la Rédaction le