Le virage domiciliaire s’impose comme un choix stratégique majeur pour répondre aux défis démographiques, économiques et humains du vieillissement. Dans un contexte où la population de plus de 75 ans va presque doubler d’ici 2050, où les dépenses liées à la perte d’autonomie augmentent fortement, et où plus de 500 000 professionnels devront être recrutés dans l’accompagnement à domicile, les acteurs du secteur cherchent des leviers d’efficacité et d’humanité. Retour sur le Lab OCIRP Autonomie du 30 septembre 2025 : « L’IA et le virage domiciliaire ».

- L’IA, levier du virage domiciliaire : elle optimise les soins à domicile, soutient les professionnels et renforce la qualité du suivi des personnes âgées.
- Un triple choc à anticiper : démographique (+75 ans = 1 sur 6 habitants en 2050), financier (+10 Md€/an), humain (+800 000 emplois à créer).
- Applications concrètes : optimisation des tournées, alertes en temps réel, coordination interprofessionnelle, automatisation administrative.
- Un impératif éthique : garantir la protection des données, le consentement, la justice sociale et le maintien du lien humain au cœur du soin.
- Conclusion : l’IA ne remplace pas les soignants, elle libère du temps pour la relation, faisant du domicile un lieu d’autonomie, d’attention et de dignité.

L’Intelligence Artificielle (IA) apparaît aujourd’hui comme un outil décisif pour réussir cette transformation : elle optimise l’organisation, renforce la qualité des soins, et soutient les professionnels. Mais elle soulève aussi des enjeux éthiques essentiels : protection de la vie privée, équité, consentement et maintien de l’humain au cœur du care.
L’IA, moteur du virage domiciliaire
Lors de la session du Lab OCIRP Autonomie du 30 septembre 2025 consacrée à « Mettre l’IA au service de la personne », la question a été posée par Jean-Manuel KUPIEC, Directeur du LAB OCIRP Autonomie :
Comment l’IA peut-elle favoriser le virage domiciliaire, non seulement économiquement, mais aussi humainement ?
Le constat est clair : l’IA n’est pas un futur hypothétique — elle est déjà à l’œuvre dans les services d’aide à domicile pour automatiser des tâches administratives, optimiser les plannings, détecter des signaux faibles et personnaliser le suivi des bénéficiaires.
Selon l’étude BPI France citée lors de la session du 30 septembre, 58% des dirigeants de PME et ETI voient l’IA comme un enjeu de survie à 3–5 ans.

Le vieillissement : un choc multidimensionnel
Trois chocs transforment notre modèle social :
- Démographique : +75 ans = 1 sur 6 habitants en 2050
- Financier : +10 milliards d’euros par an sur le coût de la perte d’autonomie
- Humain : +800 000 professionnels à recruter d’ici 2050
À cela s’ajoute un système public sous tension, pris en étau entre un État contraint et des Départements au pied du mur.
Dans ce contexte, le maintien à domicile, trois fois moins coûteux qu’un hébergement en établissement, est une évidence économique, sociale et humaine.
IA & autonomie : promesses et réalités
Les intervenants, Valentine Klimczak, Responsable marketing – ARCHE MC2 et Arnaud Duglué, Président du SYNAPSE France, Vice-Président ARCHE MC2 ont précisé le périmètre de l’IA et ses cas d’usage : vision par ordinateur, traitement du langage, machine learning, réseaux neuronaux.
Applications concrètes de l’IA dans les SSIAD :
- Optimisation des tournées
- Alerte en temps réel
- Coordination interprofessionnelle
- Automatisation administrative
- Recrutement et formation

IA + care = une relation augmentée
« L’IA ne remplacera pas les professionnels… mais ceux qui ne l’utiliseront pas seront remplacés par ceux qui l’utilisent » a indiqué Arnaud Duglué
La valeur ajoutée humaine — empathie, attention, relation — est réaffirmée. L’enjeu est d’utiliser l’IA pour libérer du temps relationnel et soutenir les professionnels.
De la prise de constantes à la prévention cardiaque via objets intelligents, la technologie s’invite dans les foyers, transformant par ailleurs le bénéficiaire en consommateur-acteur de sa santé
Veiller à l’éthique : protéger, accompagner, responsabiliser
Les défis sont majeurs :
- Protection des données
- Consentement éclairé
- Biais algorithmiques
- Respect de l’intimité à domicile
- Prévention de l’infantilisation numérique
L’acceptabilité sociale progresse mais reste fragile : 65% des Français se disent inquiets des enjeux de données personnelles
Concilier innovation et humanité
Le virage domiciliaire, soutenu par l’IA, n’est pas une simple modernisation technique. C’est une réinvention sociale : une société où la technologie libère du temps pour le lien, où l’humain reste souverain, accompagné par des outils qui augmentent sa capacité à prendre soin.
Pour aller plus loin :
▶ Retrouvez les sessions et les actualités du Lab OCIRP Autonomie : lab-autonomie.com
▶ En savoir plus sur l’OCIRP, Union d’institutions de prévoyance à gouvernance paritaire, engagée pour l’autonomie : ocirp.fr
Les enjeux éthiques de l’IA dans les SSIAD

Pour que l’innovation serve la personne comme sujet citoyen.
Marie-Anne MONTCHAMP, Directrice générale de l’OCIRP
L’introduction de l’intelligence artificielle dans les Services de Soins Infirmiers À Domicile (SSIAD) interroge nos fondements éthiques et la place du lien humain dans l’accompagnement de la fragilité.
Face au choc démographique et à la pénurie de soignants, l’IA promet optimisation des tournées, détection précoce des fragilités et soutien à la décision clinique.
Mais la question centrale demeure : comment garantir que l’innovation ne se fasse pas au détriment de la relation de soin, mais devienne au contraire un levier pour la renforcer ?
Le livre blanc d’Arche MC2 rappelle que l’éthique n’est pas un frein à l’innovation, mais sa condition de durabilité. Autonomie, bienfaisance, non-malfaisance et justice doivent encadrer le déploiement de ces technologies. Le domicile, lieu intime et singulier, impose de préserver la relation entre soignant, patient et proches aidants. L’IA peut libérer du temps, faciliter la coordination, favoriser une approche préventive et personnalisée, mais jamais remplacer l’attention et le jugement clinique.
Un autre enjeu est social et territorial : l’IA ne doit pas creuser les écarts entre zones urbaines et rurales, ni entre structures bien ou mal dotées. Elle doit être gouvernée de façon partagée et transparente, en associant patients, aidants, professionnels, acteurs publics et partenaires sociaux.
Former et accompagner les équipes est essentiel pour susciter l’adhésion et transformer l’IA en opportunité. Comme le souligne l’OCIRP, la technologie n’a de sens que si elle renforce le pouvoir d’agir des personnes, soutient les professionnels et préserve la dignité de chacun.
Ce livre blanc ne livre pas de réponses toutes faites, mais ouvre un espace collectif de réflexion : pour que l’innovation serve la personne comme sujet citoyen et transforme durablement notre manière de prendre soin.
* Ce texte est une synthèse de la préface au Tome 2 du Livre Blanc d’Arche MC2 : L’IA dans les SSIAD : éthique et enjeux.
L’IA et les services à domicile : le livre blanc Arche MC2

Arche MC2 développe des solutions logicielles innovantes dédiées aux secteurs social, médico-social et aux services à la personne.
Le Tome 1 expose définitions, technologies et opportunités de l’IA pour les SSIAD (Services de soins infirmiers à domicile). Le Tome 2 met en lumière les enjeux éthiques et les dilemmes qui accompagnent ces innovations.
1. L’IA : une révolution technologique incontournable
Les SSIAD évoluent dans un contexte de vieillissement démographique, de maladies chroniques et de pénurie de soignants. L’IA (machine learning, traitement du langage naturel, vision par ordinateur) est déjà appliquée : optimisation des tournées, suivi de plaies, transcription, aide au diagnostic. Elle promet une amélioration des soins, de la coordination et de l’efficacité organisationnelle.
2. Des promesses fortes mais conditionnées
L’IA peut réduire la charge administrative, personnaliser les traitements et anticiper les fragilités. Elle recentre le soignant sur la relation humaine. Mais ses bénéfices ne seront réels qu’avec des investissements, de la formation, une gouvernance claire et des règles de protection des données.
3. Les dilemmes éthiques
L’IA soulève des tensions : optimisation vs personnalisation, surveillance vs intimité, technologie vs expertise humaine, innovation vs justice sociale. Les risques identifiés vont de la déshumanisation et l’exclusion numérique à la standardisation des soins et la dilution des responsabilités.
4. Vers une gouvernance partagée
La clé réside dans une gouvernance éthique : penser l’IA by design (conçue en partant des besoins des utilisateurs) comme un outil au service de la personne. L’alignement des niveaux micro (soignant-patient), méso (organisation) et macro (système de santé) est indispensable. La participation des patients, aidants, soignants et institutions est centrale.
Les livres blancs d’Arche MC2 tracent une ligne directrice : l’IA est un levier majeur pour réussir le virage domiciliaire, mais uniquement si elle reste centrée sur la personne. L’enjeu est technique, organisationnel et éthique. C’est en conjuguant innovation et valeurs humanistes que les SSIAD pourront transformer les défis démographiques en opportunités de progrès responsable.
En savoir plus : Livre Blanc : L’Intelligence Artificielle dans les SSIAD : Définition & contexte
Cet article a été publié par la Rédaction le



