Face au vieillissement accéléré de la population sud-coréenne, les géants technologiques Samsung et LG s’apprêtent à lancer des robots d’assistance à destination des personnes âgées. Une offensive stratégique qui répond à un double enjeu : pallier la pénurie croissante de main-d’œuvre dans le secteur des soins et proposer des outils technologiques adaptés à la vie quotidienne des seniors.

- Samsung (Ballie) et LG (Q9) lancent des robots d’assistance seniors pour répondre au vieillissement démographique et à la pénurie de soignants.
- Ballie, sphère mobile connectée à l’écosystème SmartThings, combine IA multimodale et projection d’images personnalisées.
- Q9, robot humanoïde expressif, adapte ses interactions grâce à GPT-4 Omni et vise une relation émotionnelle avec l’utilisateur.
- Le coût élevé et les questions d’acceptabilité freinent leur adoption massive malgré un fort potentiel d’autonomie et de soutien.
- Ces innovations marquent une nouvelle étape vers une robotique empathique au service du bien vieillir à domicile.


Annoncés notamment dans un article de Korea JoongAng Daily le 21 mai dernier, ces deux nouveaux robots incarnent une génération d’assistants domestiques alliant mobilité, intelligence artificielle et personnalisation des interactions.
Ballie : La sphère intelligente signée Samsung
D’abord présentée en 2020 sous forme de prototype, Ballie fera son entrée sur le marché à l’été 2025 aux États-Unis et en Corée du Sud. Ce robot sphérique autonome se déplace librement dans l’espace, embarque une caméra, un micro, un haut-parleur et surtout un projecteur intégré capable d’afficher des contenus sur les murs ou le sol. Il est également compatible avec l’écosystème connecté SmartThings de Samsung.

Ballie intègre l’IA Gemini de Google, couplée aux propres modèles de langage de Samsung. Cette combinaison permet au robot d’interagir de façon fluide avec son environnement, en analysant des données multimodales (audio, visuelles, contextuelles) pour proposer des réponses ou actions personnalisées : gestion d’agenda, rappels médicaux, réglage de la lumière, suggestions de bien-être ou même conseils vestimentaires.
Cependant, son prix, encore non communiqué, suscite des interrogations. On pourrait s’attendre à ce que Samsung s’aligne avec d’autres robots déjà présents sur le marché, comme le Astro d’Amazon à 999 $. Selon plusieurs experts du secteur, il pourrait atteindre plusieurs millions de wons, soit un frein notable pour une adoption individuelle à grande échelle. Une enquête menée en Corée du Sud révèle que seuls 3,9% des établissements de soins de longue durée utilisent actuellement des robots, le coût étant invoqué comme principal obstacle.
Q9 : Le compagnon humanoïde et empathique de LG
De son côté, LG prépare la sortie de Q9, un robot mobile humanoïde conçu lui aussi pour assister les personnes âgées à domicile (même si on pourra lui trouver d’autres fonctions). Doté d’un système de locomotion hybride (deux jambes articulées ou bien des roues), il se distingue par son visage-écran capable d’afficher des expressions pour faciliter la communication et la connexion émotionnelle.
Q9 fonctionne grâce à Furon, une IA générative basée sur de larges modèles de langage, dont GPT-4 Omni, enrichie par les données personnelles des utilisateurs. Ce système permet au robot de s’adapter aux habitudes, d’anticiper des besoins (température, santé, activité), et de proposer des interactions naturelles et empathiques.

Présenté lors du salon IFA 2024 à Berlin, Q9 a été salué par les médias spécialisés pour son approche centrée sur l’utilisateur et sa capacité à nouer un lien émotionnel. LG mise clairement sur la dimension affective de l’assistance technologique, en rupture avec les approches plus “mécaniques” des générations précédentes de robots.
Les robots d’assistance : une réponse au vieillissement démographique
La Corée du Sud est l’un des pays les plus concernés par le vieillissement démographique. Selon Statistics Korea, le ratio de dépendance des seniors (nombre de personnes âgées pour 100 personnes en âge de travailler), passera de 25,2% en 2022 à 67% en 2042. Dans le même temps, le déficit en personnel soignant pourrait atteindre 1,55 million de travailleurs dans moins de vingt ans.
Face à cette situation, les autorités publiques comme les industriels explorent de nouvelles solutions. À l’image de Hyodol, un robot conversationnel en forme de poupée distribué par certaines municipalités, ou de projets internationaux comme ElliQ aux États-Unis, les robots d’assistance séduisent de plus en plus. Mais leur déploiement reste freiné par des coûts élevés. La généralisation de ces technologies dépendra donc fortement de soutiens publics, de subventions et de modèles économiques adaptés.

Les robots d’assistance : Les enjeux pour le secteur du vieillissement
Pour les professionnels de la silver économie, les robots d’assistance comme Ballie et Q9 offrent des perspectives concrètes. Ils peuvent renforcer l’autonomie des personnes âgées, soulager les aidants et compléter les services de soins traditionnels. Mais leur déploiement pose aussi plusieurs défis :
- Coût d’accès élevé : l’investissement initial risque de dépasser les capacités financières de nombreux foyers, en particulier chez les retraités à revenu fixe.
- Acceptabilité sociale : la présence de caméras, la collecte de données personnelles et la fiabilité perçue des IA peuvent susciter des réticences.
- Interopérabilité : une intégration fluide avec les infrastructures domestiques (téléassistance, objets connectés, systèmes de santé à distance) sera indispensable.
Samsung et LG s’imposent comme des pionniers de la robotique d’assistance domestique, en proposant deux visions complémentaires de l’aide à domicile pour les aînés : Ballie mise sur la discrétion, la mobilité et les interactions contextuelles, tandis que Q9 privilégie l’empathie, l’émotion et la présence humanoïde.
Alors que le marché mondial des robots de soins pourrait atteindre 56,7 milliards de dollars d’ici 2030 selon Research and Markets, l’enjeu n’est plus uniquement technologique. L’accessibilité, la confiance des utilisateurs et l’engagement des pouvoirs publics seront les véritables leviers de transformation. En Corée du Sud comme ailleurs, ces robots ne sont pas seulement des produits d’innovation : ils deviennent des acteurs d’un nouveau modèle de soin.
Cet article a été publié par la Rédaction le



