Le Japon s’apprête à franchir un seuil symbolique en septembre dernier : celui des 100 000 centenaires. Selon les données publiques publiées par le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales, le pays comptait exactement 99 763 personnes âgées de 100 ans ou plus, soit 4 644 de plus que l’année précédente. Une progression qui marque la 55e année consécutive de hausse et confirme la place de l’archipel au premier rang mondial en matière de longévité.
- Le Japon franchit le cap historique des 100 000 centenaires en 2025, un record mondial qui illustre 55 années consécutives de hausse.
- La longévité reste très majoritairement féminine : 88 % des centenaires sont des femmes, avec une espérance de vie de 87,1 ans contre 81,1 pour les hommes.
- La doyenne est Shigeko Kagawa, 114 ans, ancienne médecin, tandis que Kiyotaka Mizuno, 111 ans, est l’homme le plus âgé.
- Depuis 1963, le Japon est passé de 153 à 100 000 centenaires, porté par la médecine, l’alimentation et la valorisation des aînés.
- Mais ce succès s’accompagne d’un défi démographique majeur : baisse record de 900 000 habitants en 2024, hausse des coûts sociaux et solitude des personnes âgées.
Longévité au Japon : Une majorité féminine
Parmi les centenaires recensés, 88% sont des femmes, soit 87 784 personnes, contre 11 979 hommes. Cette tendance n’est pas nouvelle : les Japonaises détiennent depuis des décennies des records mondiaux d’espérance de vie, qui atteignait en 2024 87,13 ans pour elles, et 81,09 pour les hommes.
La doyenne du pays est Shigeko Kagawa, âgée de 114 ans, originaire de la préfecture de Nara (près de Kyoto). Ancienne gynécologue-obstétricienne et médecin généraliste, elle a continué à exercer même après 80 ans. « Marcher beaucoup lors des visites à domicile m’a permis de développer des jambes solides, qui sont la source de ma vitalité actuelle », a-t-elle déclaré dans un témoignage relayé par le ministère. Encore en forme, elle passe ses journées entre télévision, journaux et calligraphie. Chez les hommes, le doyen est Kiyotaka Mizuno, 111 ans, installé à Iwata, dans la préfecture de Shizuoka.
À l’échelle régionale, la préfecture de Shimane, dans l’ouest du pays, conserve pour la treizième année consécutive la première place en densité, avec 168,69 centenaires pour 100 000 habitants.
Une évolution spectaculaire depuis 1963
Le premier recensement officiel des centenaires, en 1963, n’avait comptabilisé que 153 personnes. Le seuil des 1 000 centenaires a été franchi en 1981, puis celui des 10 000 en 1998. En l’espace de soixante ans, le Japon a donc multiplié par plus de 650 le nombre de ses habitants centenaires.
Cette progression reflète à la fois les progrès médicaux, les conditions d’hygiène, une alimentation traditionnelle équilibrée et une culture qui valorise l’activité physique et le respect des aînés.
Longévité au Japon : Une fierté nationale, mais une alerte démographique
Si ce record est salué comme un signe de vitalité nationale, il révèle aussi l’ampleur des défis auxquels le Japon est confronté. Le pays connaît un vieillissement accéléré dans un contexte de baisse significative de sa population. En 2024, l’archipel a enregistré une diminution record de plus de 900 000 habitants, conséquence d’une natalité en berne.
Cette situation entraîne un déséquilibre croissant : une population âgée de plus en plus nombreuse, des coûts médicaux et sociaux en forte hausse, et une main-d’œuvre active en recul. Le Premier ministre démissionnaire Shigeru Ishiba a lui-même parlé d’une “urgence silencieuse”, promettant des mesures pour soutenir les familles, telles que la gratuité des services de garde d’enfants ou une plus grande flexibilité du travail. Mais jusqu’ici, ces politiques n’ont pas enrayé la tendance.
Un modèle de longévité scruté par le monde entier
La longévité au Japon, souvent attribuée au mode de vie, à l’alimentation et au système de santé, fascine autant qu’elle intrigue. D’autres nations industrialisées, confrontées aussi au vieillissement de leur population, observent de près la manière dont Tokyo tente d’adapter son modèle social.
Entre admiration internationale pour cette vitalité exceptionnelle et inquiétude intérieure face à l’avenir, le Japon aborde une étape décisive : parvenir à concilier la fierté d’abriter bientôt 100 000 centenaires et la nécessité de repenser en profondeur son équilibre social, démographique et économique. Il est indispensable aussi que l’archipel mette un point d’honneur à traiter la catastrophique solitude de ses habitants, qui chaque année, sont des milliers à mourir seuls. Alors vivre longtemps oui, mais sans disparaître dans l’oubli et l’indifférence des autres.
Cet article a été publié par la Rédaction le