Aujourd’hui, l’Assemblée Nationale ouvrira l’examen du projet de loi relative à la fin de vie. Ce débat est sensible, intime, souvent douloureux mais il est aussi indispensable. Il parle de notre rapport à la fin de vie, à la souffrance, à la liberté… et à la solidarité. Ce n’est pas un débat pour ou contre. C’est une réflexion collective sur comment bien accompagner la vie jusqu’au bout.
> L’hebdo du Vieillissement du Pr Bertrand Fougère : « Fin de vie, accompagner mieux pour choisir librement «

Un débat à deux jambes : l’aide à mourir et les soins palliatifs
Pour être juste, ce débat doit avancer sur deux jambes :
- La possibilité, dans des cas encadrés, d’un recours à l’aide active à mourir pour ceux dont la souffrance est devenue insupportable, malgré tout.
- Un véritable droit effectif à l’accompagnement, aux soins palliatifs, à la prise en charge de la douleur, à la présence humaine jusqu’au dernier souffle.
Si l’on renforce l’un sans garantir l’autre, on déséquilibre le débat et on prend le risque de transformer une demande de soulagement en une issue par défaut.
Les réalités d’aujourd’hui sont préoccupantes :
- 500 personnes meurent chaque jour sans soins palliatifs
- 1 Français sur 3 vit dans un territoire sans unité dédiée
- 38 % des personnes âgées ont déjà des difficultés à accéder aux soins les plus courants
Dans ces conditions, parler de « libre choix » interroge.

Fin de vie : Des expériences étrangères à regarder avec vigilance
Le Canada, la Belgique ou les Pays-Bas ont légalisé l’aide à mourir. Et partout, on observe un élargissement progressif des critères.
L’enjeu n’est pas de copier ou de rejeter ces modèles, mais de bien penser notre propre cadre, en gardant le soin, l’écoute et l’éthique comme boussoles.
Alors, comment avancer concrètement sur le sujet de la fin de vie ?
- Reconnaître que la dignité est plurielle
Elle peut passer par le droit de choisir, mais aussi par le droit de ne pas souffrir, de ne pas être abandonné, de ne pas être seul.
- Déployer une vraie politique des soins palliatifs
Ouvrir des unités dans les territoires qui n’en ont pas, former les professionnels, mieux informer les citoyens.
Mais cela pose aussi une question économique : dans un contexte budgétaire contraint, comment garantir un accès équitable sans sacrifier d’autres priorités ?
- Accompagner les professionnels et les proches
Ils sont souvent en première ligne, sans préparation suffisante. Leur rôle ne doit pas être d’arbitrer seuls entre douleur et mort.
- Construire une loi lisible, éthique et humaine
Une loi qui n’oppose pas soin et choix, mais qui donne à chacun la possibilité d’être entendu, respecté et accompagné dans sa singularité.
Mourir dans la dignité ne doit pas devenir le substitut à vivre dans l’indignité
Et vous, quelles conditions vous semblent indispensables pour avancer sereinement sur ce sujet ?
L’hebdo du Vieillissement est une tribune régulière du Pr Bertrand Fougère

Bertrand FOUGÈRE
Professeur de Gériatrie
Pôle Vieillissement – Université / CHU ToursBertrand Fougère est Professeur de Gériatrie, depuis 2018 spécialiste reconnu dans le domaine du vieillissement et de la prise en charge des personnes âgées. Fort de son expertise, il collabore régulièrement avec les ministères de la Santé et des Solidarités pour développer des politiques de prévention et d’accompagnement innovantes. Son parcours est marqué par une participation à des initiatives structurantes visant à renforcer l’autonomie et la qualité de vie des personnes âgées, ainsi qu’à soutenir les aidants.
Cet article a été publié par la Rédaction le