Les Échos Études ont publié une analyse détaillée sur l’avenir du secteur médico-social, intitulée « Renouveau des EHPAD et mutations des marchés de l’habitat des seniors ». À cette occasion, Élodie Bervily-Itasse, directrice éditoriale des Échos Études, revient sur les profondes transformations que traverse le secteur et les réponses émergentes face à une crise multidimensionnelle.
![[PAROLE D’EXPERT] Les Échos Études - Renouveau des EHPAD et mutations des marchés de l’habitat des seniors](https://www.silvereco.fr/wp-content/uploads/2025/08/une-les-echos-etudes-itw-1-1024x576.png)

Les EHPAD : Un modèle économique sous tension
Le secteur des EHPAD est confronté aujourd’hui à une crise à la fois structurelle et conjoncturelle. Selon Élodie Bervily-Itasse, les établissements sont sous-dotés, sous-staffés et souffrent de forts taux d’absentéisme de leur personnel soignant. À cela s’ajoutent des difficultés de recrutement, une fidélisation fragile du personnel et une médicalisation insuffisante, alors même que les besoins en soins explosent.
Trois grandes crises ont fragilisé davantage le modèle :
- La crise sanitaire, responsable de plus de 40 000 décès parmi les résidents
- La crise inflationniste, qui a renchéri les coûts d’exploitation
- Et la crise réputationnelle, amplifiée par l’affaire Orpéa et le livre de Victor Castanet en 2022.

Un déficit qui progresse, surtout dans le public
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2023, 26% des EHPAD privés étaient déficitaires, contre 15% un an plus tôt. La situation est encore plus préoccupante dans le secteur associatif et public, où 71% des établissements sont déficitaires fin 2024, avec un pic à 81% fin 2023 selon la Fédération hospitalière de France.
Le secteur privé, mieux armé, bénéficie d’un pricing power lui permettant d’ajuster les tarifs d’hébergement malgré la baisse d’occupation, limitant ainsi les pertes.
EHPAD : Des taux d’occupation toujours en berne
Le taux d’occupation “nerf de la guerre” de la viabilité financière des établissements, reste préoccupant. De 93% en 2019, il est tombé à 88% en 2023, et peine à retrouver son niveau d’avant-crise malgré une légère amélioration en 2024 et 2025. Le recours croissant aux séjours temporaires a contribué à cette stabilisation.
Mais plusieurs obstacles freinent toujours la remontée :
- Une image dégradée du secteur (plus de 60% des Français ont une perception négative des EHPAD)
- Une entrée plus tardive en établissement, souvent par nécessité plutôt que par choix
- Des fermetures de lits faute de personnel
- Et la montée en puissance du virage domiciliaire, qui promeut le maintien à domicile des personnes âgées dépendantes.

Des besoins accrus face à une offre inadaptée
Malgré une baisse générale d’occupation, les listes d’attente restent longues pour les cas de grande dépendance. Cela tient à une offre de soins encore inadaptée : 66% des résidents souffrent de troubles cognitifs, mais seulement 25% des établissements disposent de structures spécialisées pour y répondre.
De plus, 30% des EHPAD ne disposent pas de médecin coordinateur, et aucun établissement n’est en capacité d’assurer une présence infirmière 24h/24, 7j/7, faute de moyens.
L’EHPAD de demain : plus médicalisé et ancré dans le territoire
Face à ce constat, l’EHPAD de demain devra évoluer sur plusieurs plans. Il doit devenir à la fois un lieu de vie (ce qu’il est déjà) mais surtout un lieu de soin, en renforçant la prise en charge des pathologies lourdes, en particulier la maladie d’Alzheimer, présente chez une majorité des résidents.
On assiste également à l’essor des Centres de Ressources Territoriaux (CRT), qui apportent expertise et soutien aux aidants. Près de 300 CRT ont déjà été créés, avec un objectif de 500 d’ici 2028.
Par ailleurs, les établissements développent des thérapies non-médicamenteuses (activité physique, thérapies psychologiques, approches hygiéno-diététiques) pour limiter la polymédication et ses effets indésirables.

Des alternatives qui se développent
Élodie Bervily-Itasse met également en lumière la diversification de l’offre d’hébergement pour les personnes âgées. En amont de la grande dépendance, on assiste à un essor :
- Des résidences services seniors, qui intègrent de plus en plus de services d’accompagnement et de soins
- De modèles d’habitat partagé ou intergénérationnel, qui permettent une vie collective sécurisée et favorise l’autonomie
Les acteurs traditionnels des EHPAD s’intéressent de près à ces modèles, dans une logique de continuum de prise en charge, de la dépendance légère à la très grande dépendance.
Une étude pour comprendre et anticiper
L’étude des Échos s’appuie sur une analyse fine des comptes de 725 EHPAD privés, mais aussi sur des retours de terrain et des exemples concrets de nouveaux modèles. Elle vise à fournir aux décideurs publics et privés des clés pour comprendre et anticiper l’avenir du secteur.
REPLAY : Les Échos Études – Renouveau des EHPAD et mutations des marchés de l’habitat des seniors
Cet article a été publié par la Rédaction le



