Transition démographique : un tournant historique en France avec plus de décès que de naissances en 2025

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Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la France enregistre un solde naturel négatif : entre juin 2024 et mai 2025, le nombre de décès (651 200) a dépassé celui des naissances (650 400), selon une étude de l’INSEE. Ce basculement démographique, anticipé pour 2027 voire 2035 par les projections précédentes, s’est finalement produit plus tôt que prévu. Un bouleversement historique qui marque un tournant profond pour la société française.

  • En 2025, la France enregistre pour la première fois depuis 1945 plus de décès (651 200) que de naissances (650 400), selon l’INSEE.
  • Ce solde naturel négatif résulte du vieillissement des baby-boomers et d’une fécondité historiquement basse (1,62 enfant/femme).
  • Cette transition démographique fragilise le financement du système de retraite par répartition et alerte sur l’avenir du modèle social.
  • Emmanuel Macron appelle à un « réarmement démographique » avec des mesures en réflexion comme le congé de naissance ou le soutien à la parentalité.
  • L’avance de ce basculement (attendu en 2027 ou 2035) impose une réponse politique urgente pour redéfinir la solidarité entre générations.

Une dynamique démographique inversée

Ce phénomène, inédit depuis 1945, s’explique par la conjonction de deux tendances lourdes : la baisse continue de la fécondité et l’augmentation du nombre de décès liée au vieillissement de la population. Depuis 2015, la natalité française ne cesse de reculer, tandis que la génération du baby boom entre progressivement dans les âges les plus exposés à la mortalité. En 2024, l’indice conjoncturel de fécondité est tombé à 1,62 enfant par femme, un des niveaux les plus bas depuis l’après-guerre. Dans le même temps, le nombre de décès a augmenté de 3% sur les cinq premiers mois de 2025, en grande partie en raison de l’arrivée à l’âge de 80 ans des premiers baby boomers.

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Ce basculement est d’autant plus significatif que la France, jusque-là, résistait mieux que ses voisins européens à la dénatalité. Alors que l’Italie ou l’Allemagne faisaient déjà face à un solde naturel négatif depuis plusieurs années, la France restait l’un des rares pays du continent à afficher un certain dynamisme démographique. Ce n’est désormais plus le cas.

Un choc démographique silencieux mais profond

Le passage d’un solde naturel positif à un solde négatif n’est pas immédiatement perceptible dans le quotidien des Français. Pourtant, ses implications sont profondes et durables. Ce changement marque le début d’une transition démographique qui affectera tous les piliers du modèle social français : retraites, assurance maladie, prestations familiales, équilibre budgétaire…

Comme le souligne le sociologue Julien Damon dans des propos recueillis sur Radio France, ce phénomène n’est pas un simple accident statistique. Il s’agit d’une tendance de fond, qui bouleverse les équilibres entre générations. Moins de naissances signifie à terme une baisse du nombre d’actifs, donc moins de cotisations pour financer un nombre croissant de retraités. En 2021, on comptait environ 2,5 cotisants pour un retraité. Ce ratio pourrait chuter à 1,4 d’ici 2040, selon un rapport présenté par Pierre Cazeneuve à l’Assemblée nationale. Une telle évolution rend le système de retraite par répartition de plus en plus difficile à soutenir sans réforme structurelle.

Une inquiétude croissante au sommet de l’État

Face à cette situation, le président Emmanuel Macron a réuni en juillet des démographes, économistes et sociologues à l’Élysée pour cerner les causes de cette dénatalité et en évaluer les conséquences. Dès le début de l’année 2024, il appelait à un “réarmement démographique” de la nation. Parmi les pistes évoquées figurent un plan de lutte contre l’infertilité, la création d’un registre des naissances pour améliorer le suivi de la mortalité infantile, ou encore une réforme du complément de libre choix du mode de garde pour mieux soutenir les familles.

Un projet emblématique reste toutefois en suspens : celui du “congé de naissance”. Annoncé par le chef de l’État, ce dispositif vise à offrir un congé plus court que le congé parental actuel mais mieux rémunéré, afin d’inciter davantage de parents à avoir des enfants. La ministre de la Santé, Catherine Vautrin, a confirmé que cette mesure ferait l’objet de discussions dans le budget 2026.

Une réponse encore hésitante à cette transition accélérée

Le choc est d’autant plus rude qu’il intervient avec dix ans d’avance sur les prévisions initiales. L’Ined (Institut national d’études démographiques) envisageait un solde naturel négatif dans le meilleur des cas en 2027, dans le pire en 2035 comme mentionné plus haut. Désormais, ce scénario est une réalité. Pour les experts, comme Chloé Tavan de l’Insee, cette bascule ne semble pas être un accident ponctuel, mais bien le signe d’un nouveau cycle démographique.

Le défi est plus que jamais politique. Alors que la démographie devient un enjeu aussi stratégique que les finances publiques (puisque intrinsèquement lié), le gouvernement peine encore à définir une politique familiale à hauteur de l’enjeu. Dans un contexte de fortes contraintes budgétaires, les mesures incitatives tardent à se concrétiser. Pourtant, les comparaisons avec l’Italie, où un vaste plan de soutien à la natalité a été déployé, montrent que l’inaction pourrait coûter plus cher à long terme.

Transition démographique : Un avenir à redéfinir

Cette inversion du solde naturel constitue un marqueur profond de la transformation de la société française. Elle interroge sur la place des jeunes, sur les conditions de vie des familles, sur le rôle de l’État dans la régulation des grands équilibres sociaux.

Au-delà des statistiques, c’est la projection collective vers l’avenir qui est en jeu. La baisse de la natalité n’est pas seulement un phénomène économique, elle est aussi et surtout le reflet d’un climat d’incertitudes, de précarité, de difficultés à concilier vie professionnelle et vie familiale. Entre les conflits diplomatiques, les guerres, le réchauffement climatique, beaucoup de jeunes ne se voient pas fonder une famille. Si la France veut relever le défi du vieillissement et préserver son modèle social, elle devra repenser en profondeur ses politiques familiales, son modèle de solidarité intergénérationnelle, et peut-être sa vision de l’avenir

Le dépassement du nombre de décès sur celui des naissances en France n’est pas qu’un simple tournant démographique. C’est un signal fort envoyé à la société, aux institutions et aux responsables politiques. Une alerte silencieuse mais urgente, qui appelle des réponses ambitieuses, structurantes et durables. Car c’est aujourd’hui que se joue l’équilibre de la France de demain.


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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