Le dernier rapport Perspectives de l’emploi de l’OCDE dresse un constat sans appel : les économies avancées sont confrontées à une nouvelle ère marquée non plus par une pénurie d’emplois, mais par une pénurie de main-d’œuvre, conséquence directe du vieillissement démographique et du recul de la fécondité.

- Le vieillissement démographique réduit la population active et menace la croissance mondiale : le PIB par habitant pourrait chuter de 40 % d’ici 2060.
- Le taux de dépendance des plus de 65 ans est passé de 19 % en 1980 à 31 % en 2023, et pourrait atteindre 52 % en 2060.
- L’OCDE préconise de mobiliser les jeunes, femmes, migrants et seniors pour compenser la pénurie de main-d’œuvre.
- Les seniors restent une ressource clé mais font face à stéréotypes, manque de formation et faible accès aux opportunités.
- L’IA peut aider, mais seule une stratégie globale et équitable pourra maintenir la prospérité et la cohésion sociale.

Un marché du travail résilient, mais fragile
En 2025, le marché du travail de l’OCDE reste robuste. Le taux de chômage s’établit à 4,9% en mai 2025, un niveau historiquement bas, tandis que le taux d’emploi atteint 72,1% et le taux d’activité 76,6% au premier trimestre.
Mais derrière ces chiffres solides, les premiers signes d’essoufflement apparaissent : la croissance de l’emploi ralentit, les salaires peinent à retrouver leur niveau d’avant 2021 et les tensions géopolitiques pourraient fragiliser davantage cette dynamique.

Vieillissement démographique : un tournant historique
L’année 2025 marque un tournant démographique. Pour la première fois, la population d’âge actif (20-64 ans) commence à reculer dans la majorité des pays de l’OCDE, une tendance qui devrait se poursuivre jusqu’en 2060.
Parallèlement, le taux de dépendance des personnes âgées (rapport entre les 65 ans et plus et la population active) a déjà atteint 31% en 2023, et pourrait grimper à 52% en 2060, contre seulement 19% en 1980. Dans certains pays, ce ratio dépassera même 70%, accentuant ainsi la pression économique et sociale.

Vieillissement démographique : Une croissance économique en danger
Le vieillissement démographique pourrait freiner la croissance mondiale de manière significative. Selon l’OCDE, la croissance annuelle du PIB par habitant passerait en moyenne de 1% (2006-2019) à seulement 0,6% (2024-2060), soit une chute de 40%. Tous les pays de l’OCDE seraient concernés, à l’exception de l’Irlande et des États-Unis.
Les leviers pour contrer la crise
Face à ce défi, l’OCDE préconise une mobilisation urgente des ressources de main-d’oeuvre inexploitées :
- Les jeunes (15-29 ans) : dans certains pays, plus de 15% sont sans emploi ni formation, notamment en Espagne, Italie, Grèce ou Turquie.
- Les immigrés : une hausse des flux migratoires au niveau du quart supérieur des pays les plus ouverts permettrait d’améliorer la croissance de 0,08 point de pourcentage (pp).
- Les femmes : réduire l’écart d’emploi hommes-femmes pourrait ajouter 0,2 pp de croissance annuelle du PIB par habitant, et jusqu’au double si les heures travaillées s’égalisent.
- Les seniors : inciter les travailleurs en bonne santé à prolonger leur carrière pourrait accroître la croissance de 0,2 à 0,3 pp par an dans de nombreux pays.

Les seniors au coeur de la réponse démographique
Les travailleurs âgés représentent une ressource essentielle pour atténuer les effets du vieillissement de la population active. Le rapport souligne que prolonger leur participation au marché du travail permettrait non seulement de soutenir la croissance, mais aussi de préserver des savoir-faire précieux.
Toutefois, les seniors font face à plusieurs obstacles :
- Une moindre participation aux formations (seul un tiers des 60-65 ans en 2023, contre plus de la moitié des 25-44 ans).
- Des compétences plus limitées en lecture et en résolution de problème.
- Des stéréotypes persistants liés à l’âge.
Pour inverser cette tendance, l’OCDE insiste sur la nécessité d’investir dans la formation continue, de développer des politiques inclusives de recrutement et de combattre l’âgisme qui freine encore trop souvent leur évolution professionnelle.

L’IA : Un outil, mais pas une solution miracle
L’intelligence artificielle pourrait aider à alléger la charge de travail, prolonger la vie active et améliorer la productivité. Mais l’OCDE insiste : l’IA ne suffira pas à compenser la baisse structurelle de la main-d’œuvre humaine. Sans stratégie globale, le ralentissement de la croissance risque de menacer la cohésion sociale et la viabilité économique des systèmes sociaux.
Le vieillissement démographique : un défi aussi politique que sociétal
Au-delà des chiffres, le vieillissement démographique pose une question cruciale de justice intergénérationnelle. Alors que le patrimoine et les revenus se concentrent de plus en plus chez les seniors, les jeunes générations subissent une précarité accrue, avec un accès plus difficile au logement et à l’emploi stable.
L’OCDE souligne que sans politiques équitables, le fossé entre générations pourrait s’accentuer, fragilisant la cohésion sociale. Les réformes devront donc conjuguer efficacité économique et équité, afin que l’adaptation au choc démographique bénéficie à toutes les tranches d’âge.

Un impératif d’action indispensable
Le constat est clair : la démographie impose aux pays de l’OCDE un virage stratégique. Maintenir la prospérité et la cohésion sociale dépendra de la capacité à prolonger les carrières, à intégrer davantage de seniors, femmes et migrants sur le marché du travail, et à investir dans les compétences pour accompagner les transformations technologiques.
La crise démographique n’est pas une fatalité. Mais sans action forte et rapide, elle pourrait durablement freiner la croissance et accentuer les fractures sociales dans l’ensemble des économies avancées.
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Cet article a été publié par la Rédaction le



