L’accompagnement des malades Alzheimer, interview d’Arnaud Maigre, Directeur Général de Réseau AMA

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La maladie d’Alzheimer est l’une des principales causes d’entrée en établissement. En France 900 000 personnes sont atteintes de la maladie. (en moyenne 225 000 personnes sont diagnostiquées chaque année.) (Source : Fondation pour la recherche médicale, Alzheimer en chiffres.).

Loin des « unités Alzheimer » ou « villages Alzheimer », Réseau AMA met en place un accueil inclusif des malades d’Alzheimer dans ses établissements pour personnes âgées Les Babadines. Le réseau est également investi dans l’accompagnement à domicile des malades d’Alzheimer et troubles apparentés à travers l’enseigne d’aide à domicile AD Seniors, et dans la formation des aidants professionnels et familiaux, avec son organisme de formations en ligne AMA Campus.

Arnaud Maigre, Président de Réseau AMA, en s’appuyant sur les spécificités de la maladie d’Alzheimer, revient sur l’accompagnement des malades par les différentes enseignes du réseau. Une vision à contre-courant qu’il est intéressant de découvrir.

Comment est organisé l’accompagnement des malades d’Alzheimer dans Les Babadines ?

Les Babadines sont des établissements d’accueil des personnes âgées autonomes ou dépendantes (jusqu’au GIR 1), ce sont de véritables alternatives à la maison de retraite. Dans Les Babadines installées en villages pour seniors, nous recevons beaucoup de demandes pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, mais nous faisons le choix de n’en accueillir qu’une minorité. Car notre projet est de créer des villages inclusifs.

Nous comprenons qu’il n’est pas aisé de placer tous les malades dans des structures inclusives. Cependant, nous pensons que l’accompagnement le mieux adapté est l’accueil inclusif. 

La chose essentielle à prendre en compte dans l’accueil des personnes malades d’Alzheimer, est qu’elles sont très sensibles émotionnellement. En mettant ensemble des personnes dont les émotions sont à vifs, on ne fait qu’exacerber leur émotivité, alors qu’il faudrait au contraire apaiser cette émotion. 

L’accueil inclusif

Dans nos villages inclusifs, comprenant des maisons avec jardins privatifs, un comportement déviant n’est pas perturbant pour les autres locataires.

Prenons un exemple :

Un de nos résidents souhaite passer une bonne partie de la journée à pêcher. Nous lui avons installé de quoi le faire dans son jardin, ce qui lui procure de l’apaisement. Il ne déambule pas dans des couloirs en perturbant les autres. À l’inverse, lors de ses moments de lucidité, il peut partager avec les autres des jeux et des repas, continuer à participer à une vie sociale. Car la maladie d’Alzheimer n’est pas une : il y a des moments de conscience pendant lesquels la personne n’est pas débordée par son émotion. Les moments de partage sont alors possibles.

(Nous avons le même principe d’inclusivité dans nos micro-crèches Les p’tits Babadins, dans lesquelles nous accueillons des enfants ayant des troubles du neurodéveloppement – tout en leur proposant un accompagnement adapté – pour qu’ils grandissent avec leurs pairs neurotypiques).

Le cadre de vie agréable

Nous prenons soin de créer un cadre de vie agréable, tant dans la décoration, qu’avec l’environnement externe avec jardin. Mais aussi, comme expliqué, en ne perturbant pas les autres locataires par des comportements assimilables à de la démence (plus facile à faire dans une maison que dans un appartement !)

Maladies neurodégénératives - Alzheimer

Offrir un cadre de vie apaisé participe à l’accompagnement des malades d’Alzheimer, et même parfois, selon nos constats, à la régression des comportements agressifs.

La place de l’accompagnement non-médicamenteux

Le cadre de vie chaleureux et serein qui procure de l’apaisement, est une des composantes de l’accompagnement non-médicamenteux. L’autre composante est, comme vous le savez, les animations et ateliers. Nous pratiquons l’art-thérapie, la stimulation multisensorielle et sensitive. Notamment à travers la musique. (Rappelons-nous que la musique ne s’oublie pas, la personne peut retrouver la mémoire des émotions intactes.)

Nous avons ainsi une approche collective avec les animations, et pour les personnes qui ne souhaitent pas participer au groupe, nous mettons d’abord en place une approche individuelle, pour qu’elles réapprennent à créer du lien social.

L’accompagnement à domicile des malades d’Alzheimer

Nous formons nos auxiliaires de vie à une approche de pédagogie active (comme dans les crèches avec la méthode Montessori) :

  • Partir des capacités de la personne pour essayer de l’emmener plus loin, favoriser autant que possible son autonomie.
  • Savoir s’adapter à chaque stade de la maladie.

Il faut penser également aux moyens techniques d’accompagnement, les « béquilles mémorielles » (flécher un appartement pour soulager la personne par exemple). Nos salariés ont accès aux formations de notre organisme de formation AMA Campus :

Nous proposons une formation Alzheimer pour mieux accompagner le malade. Nous construisons en ce moment une formation Montessori / Alzheimer, en s’inspirant des méthodes développées dans la petite enfance.

Vos conseils pour aider la personne malade ?

Il faut être attentif au regard que l’on projette sur la personne : on accepte la maladie (qui ne se guérit pas), et on acquiert la technique et le savoir-être pour ne pas renvoyer au malade son insuffisance.

Il est important de ne pas mettre la personne malade en situation d’échec, et de comprendre que le malade d’Alzheimer est dans une logique émotive et non rationnelle.  

Ainsi, lorsqu’un proche n’est pas reconnu, une fille par sa mère par exemple, nous lui conseillons de ne pas relever un « Tu n’es pas ma fille » et d’aller au-delà du constat « Maman ne sait plus ». La réponse la plus adaptée est de recréer du lien.

Nous arrivons à la question de la prise en compte des aidants familiaux

Aider une personne - Aidant

Effectivement, la prise en compte des proches aidants est particulièrement importante dans l’accompagnement des malades d’Alzheimer. Parce que cette logique différente de la personne met tout le monde en souffrance : le malade, et la personne non reconnue.

L’aidant familial a tout un référentiel qui n’est plus possible, il faut l’accompagner parce qu’il reçoit des chocs émotionnels en permanence. Son énergie est comme aspirée. Le professionnel est là aussi pour lui donner les clés, lui injecter cette énergie qui lui est prise, et lui apporter un apaisement affectif. C’est une sorte de management d’équipe.

J’aimerais ajouter que la maladie d’Alzheimer, aussi douloureuse soit-elle, est une école de vie : elle peut faire grandir l’aidant et la personne malade. (qui vit des émotions qu’elle n’a parfois jamais vécu avant, avec ses enfants).

Le mot de la fin ?

Il faudrait changer son regard : avec la maladie d’Alzheimer, nous ne sommes plus dans le cognitif, mais dans l’émotif.

Et apporter des réponses aux émotions.


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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