Bien-Vieillir en France : 27 propositions de l’Union nationale ADMR

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Suite aux annonces gouvernementales à propos d’une réforme du grand âge, l’Union nationale ADMR a rédigé 27 propositions de loi portant mesures pour bâtir la société du Bien-Vieillir en France.

Thierry D'ABOVILLE de l'ADMR
Marie-Josée DAGUIN, ADMR

Passée la déception autour d’une loi Grand Âge et Autonomie qui n’a jamais vu le jour, l’espoir pourrait bien venir de cette proposition de loi intitulée “Mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France“. Si le texte en l’état ne comporte que 14 articles, l’ADMR souhaite l’enrichir avec 27 grandes propositions imprégnées d’une vision éthique et sociale de l’accompagnement des personnes en perte d’autonomie, à leur domicile.
Pour que cette nouvelle loi soit juste et égalitaire, elle doit dépasser les seuls sujets liés à l’accompagnement des personnes âgées et intégrer pleinement les personnes vivant avec un handicap. A défaut, la prochaine Convention nationale du handicap devra s’en saisir.
L’enjeux d’un texte porteur de grandes réformes autour du bien vieillir doit s’inscrire pleinement autour des sujets qui touchent et impactent le Domicile avec un grand D.
Un grand D comme dans le mot défi, puisque le bien vieillir à domicile représente un extraordinaire défi pour les années à venir lorsque nous savons que le nombre de Français de plus de 85 ans triplera d’ici à 2050, et qu’il y aura alors 2,2 millions de personnes en perte d’autonomie. Parmi elles, 85 % voudront vieillir à domicile.
Ainsi, quoi de plus logique que de faire des acteurs du domicile les principaux protagonistes d’un projet de société partagé par tous.
En assurant chaque jour des gestes essentiels auprès de plus d’un million de personnes en perte d’autonomie, personnes âgées ou vivant avec un handicap, nous protégeons leur santé et préservons leur dignité. Nous mobilisons nos salariés et nos bénévoles pour entretenir, sur tout le territoire, le lien social indispensable aux plus isolés.
C’est pourquoi cette loi doit s’inspirer de la vie des territoires, qu’ils soient urbains mais aussi et surtout ruraux afin de respecter le projet de vie de chacun.
Cela suppose donc un accompagnement de qualité et de proximité, mais aussi d’adapter les logements des personnes en proposant un ensemble de services et une meilleure coordination de l’offre d’aide et de soin, tout en s’appuyant sur
les femmes et les hommes qui chaque jour apportent une présence chez les personnes fragiles.
Nous attendons de cette loi qu’elle soit ambitieuse, juste et à l’écoute des besoins des personnes et des professionnels afin de bâtir une meilleure société du bien vieillir en France.

Marie-Josée DAGUIN, Présidente de l’Union nationale ADMR et Thierry d’ABOVILLE, Secrétaire général de l’Union nationale ADMR
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Pilier 1 : Organisation et structuration de l’offre de services

1. Mettre en place une organisation permettant d’assurer une coordination générale autour de la personne

27 propositions de l'ADMR pour bien-vieillir en France, Pilier 1

L’accompagnement d’une personne en perte d’autonomie s’apparente trop souvent aujourd’hui à un parcours du combattant. En effet, la pluralité d’acteurs permettant de répondre à des besoins souvent divers (aide à la vie quotidienne, livraison de repas, soins infirmiers à domicile etc) génère régulièrement des ruptures de prise en charge. Par ailleurs, les aidants rencontrent de réelles difficultés à identifier puis coordonner les différents acteurs intervenant au domicile de leur proche à cause de leur diversité et de la méconnaissance des solutions existantes. Cette mission génère trop souvent épuisement et isolement. L’ADMR a défini dans le cadre de son expérimentation Autono’Vie®, le nouveau métier de coordinateur de parcours : un interlocuteur unique assure une coordination générale autour de la personne et devient l’interlocuteur privilégié des personnes en perte d’autonomie et de leurs aidants. Il les accompagne dans leurs besoins en aide à domicile, soins à domicile, leurs démarches administratives, les recherches de financements individuels, l’aménagement de leur domicile, leur inclusion sociale, etc.

D’autre part, les échanges entre tous les professionnels intervenant auprès des personnes accompagnées à domicile sont essentiels. Or, nous constatons encore trop largement un fonctionnement en « silos » entre les différents secteurs d’activité (sanitaire, social et médico-social). La création de liens entre tous les acteurs doit être facilitée dès que possible, et vivement encouragée, au bénéfice des personnes accompagnées.

2. Soutenir le développement des centres de santé

Les centres de santé (CDS) sont des structures sanitaires délivrant principalement des soins de premier recours. Souvent situés en zones rurales, ils représentent parfois pour les patients le seul contact avec le secteur de la santé, dans un contexte de désertification médicale. Centres de santé infirmiers, polyvalents et médicaux, leur rôle est indispensable pour préserver la santé des personnes. Pourtant, leur développement reste difficile, au regard de problématiques de financement et d’attractivité, notamment pour le recrutement de médecins. Un renforcement du soutien au développement de ces structures trouverait toute sa place dans la dynamique actuelle d’accélération de l’exercice coordonné. Ce soutien doit aussi se traduire par un financement adapté de ces structures. L’absence de financement pérenne de l’avenant 43 par l’Etat fragilise d’ores et déjà les CDS. Sur le moyen terme, la survie de ces structures est en jeu et les conditions économiques actuelles freinent le développement de nouveaux centres.

3. Poursuivre le déploiement de l’habitat inclusif

3.1. Reconnaître l’implication et les missions de Services autonomie à domicile (SAD) dans les habitats accompagnés, partagés et insérés dans la vie locale (API)

  • Ne pas cantonner les services d’aide à des missions de prestataire de services mais reconnaître leur expertise domiciliaire lors du montage de projet
  • Confier prioritairement aux SAD le projet de vie sociale et l’animation sociale lorsqu’ils sont parties prenantes du projet
  • Faciliter la reconnaissance des SAD en tant que “Porteur de projet partagé“ (3P) en veillant à ne pas alourdir les procédures administratives

3.2. Ne pas diminuer la part de financement de l’Etat pour le développement des projets

L’habitat inclusif connaît une forte dynamique de développement grâce à la création de l’aide à la vie partagée et son financement par la CNSA. Ce financement va progressivement être réduit pour arriver, en 2025, à une participation égale entre les conseils départementaux et la CNSA. Nous souhaitons que cette réduction n’intervienne pas au détriment du
développement de ces projets, alors que l’offre actuelle ne répond pas encore à l’ensemble des besoins des personnes.

Pilier 2 : Gouvernance

4. Affirmer une gouvernance départementale tout en garantissant une voie de recours en cas de litige

27 propositions de l'ADMR pour bien-vieillir en France, Pilier 2

Il est nécessaire de donner aux conseils départementaux les moyens de remplir leur mission historique de chef de file de l’action sociale à condition d’instaurer une voie de recours amiable en cas de conflit entre le conseil départemental et le service. Pour cela, il faudrait créer une commission de recours amiable de niveau départemental qui aurait autorité pour arbitrer un litige entre un SAD et son conseil départemental. En cas d’absence d’accord entre les parties et si la commission juge que le département ou le service ne respecte pas ses engagements, la commission aurait la capacité d’arbitrer rapidement sur le litige.

5. Renforcer le lien entre les agences régionales de santé et les structures délivrant des soins à domicile

Ces structures, à savoir les centres de santé (CDS) et les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), ne sont pas toujours bien identifiées par leur propre autorité de tutelle, à savoir les ARS. Pourtant, une connaissance mutuelle est indispensable afin de permettre une bonne gestion dans un contexte de réforme et de développement de l’exercice coordonné. L’intégration et la consultation systématique des CDS et des SSIAD par les ARS, dans le cadre de la constitution de leur Projet Régional de Santé (PRS), est indispensable pour favoriser le développement d’un lien et renforcer la place des CDS et des SSIAD en tant qu’acteurs importants de la santé à domicile.

Pilier 3 : L’accompagnement de la personne

6. Proposer les deux heures de lien sociale sans participation financière pour les bénéficiaires de l’APA

27 propositions de l'ADMR pour bien-vieillir en France, Pilier 3

L’article 75 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a ouvert la possibilité, pour les personnes bénéficiaires de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA), d’ajouter des heures de lien social à leur plan d’aide. Ces heures permettront notamment de prévenir la perte d’autonomie et l’isolement des personnes âgées. Cette mesure est vivement soutenue par l’ADMR, car elle pourra avoir un impact positif sur les personnes accompagnées, leurs aidants, ainsi que les professionnels d’intervention qui verraient leurs plannings complétés. Même si le texte prévoit une augmentation des concours de la CNSA au titre de l’APA, l’article ne prévoit pas une solvabilisation totale de la mesure. Il existe un risque important de non-recours à ce dispositif, de nombreux bénéficiaires n’utilisant déjà pas la totalité des heures prévues par leur plan d’aide en raison du ticket modérateur qui leur est appliqué.

7. Uniformiser l’appellation et la définition de l’aidant

Actuellement, il existe des différences relatives à l’appellation et à la définition d’aidant d’une personne âgée et d’une personne en situation de handicap. Nous pensons nécessaire de gommer toute disparité entre ces personnes lui apportent régulièrement une aide indispensable à leur proche pour lui permettre de continuer à vivre à domicile. La définition prévue à l’article L. 113-1- 3 du code de l’action sociale et des familles pourrait être retenue comme socle, et adaptée en conséquence.

8. Développer, ancrer dans le droit commun et financer les temps de répit des aidants

Repères indispensables pour leurs proches, les aidants doivent eux aussi pouvoir être soutenus et accompagnés dans leur quotidien. Ce soutien passe par l’organisation de temps de pause, où l’aidant peut s’absenter et être relayé par un professionnel de confiance qui se déplace au domicile de la personne aidée Actuellement, ces temps de pause relèvent de deux régimes :

  • Le régime de droit commun, sans application d’une dérogation au droit du travail. Ainsi, la venue du relayeur à domicile est limitée à un nombre d’heures restreint par jour (dans le cas d’un service prestataire)
  • Le régime expérimental, permis par la loi ESSOC. Quelques services expérimentateurs ont la possibilité de déroger aux règles du droit du travail pour permettre l’intervenant d’un seul et même relayeur sur une durée de 36h à 6 jours. Cette expérimentation prend fin au 31 décembre 2023.

L’ADMR plaide pour que la loi instaure des temps de répit dédiés aux aidants, sans qu’ils relèvent d’un régime expérimental. Cette inscription dans le droit commun permettrait de conduire au développement de solutions encadrées par la réglementation et répondant à des exigences de qualité communes. Elle viendrait également clarifier les différentes appellations existantes actuellement mais qui désignent parfois des actions semblables (répit, relayage, suppléance…).

Enfin, sans financement dédié à ces temps de répit, les aidants ne pourront s’en saisir. L’intervention d’un professionnel sur plusieurs dizaines d’heures d’affilée représente un coût souvent trop élevé pour les aidants et leurs proches. Ainsi, la création d’un financement spécifique est aussi indispensable.

9. Faciliter le recours au forfait répit prévu dans les plans APA pour les aidants

Dans l’attente du développement et du financement de solutions pérennes de répit des aidants, ce forfait répit, créé par la loi ASV, est actuellement sous consommé car difficilement mobilisable. En effet, pour recourir à ce forfait répit (qui permet de financer des prestations de relais des aidants), le plan d’aide du bénéficiaire de l’APA doit être saturé (c’est-à-dire que le plafond national défini pour le GIR de la personne aidée, est atteint). Or, les plans d’aide sont rarement saturés. Cette règle réduit le recours au forfait répit, alors même que la CNSA verse une surdotation aux conseils départementaux pour financer ce forfait. Ainsi, ses modalités d’utilisation mériteraient d’être facilitées et clarifiées.

10. Créer une instance territoriale de recueil, de traitement et d’évaluation des alertes relatives aux situations de maltraitance

Comme préconisé dans le plaidoyer ADMR relatif à la maltraitance et rappelé dans la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, il est nécessaire de créer une instance territoriale de recueil, de traitement et d’évaluation des alertes à l’instar des cellules de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes (CRIP) mises en place par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance. Cette instance doit être l’entrée unique du recueil et du traitement de l’ensemble des alertes réalisées par les services sur le territoire, à l’instar des “Point Focal Régional“ des Agences Régionales de Santé.

11. Clarifier le processus de déclaration, de recueil et de traitement sur chaque territoire

Via la création d’un schéma récapitulatif et d’une procédure précisant les informations nécessaires à une bonne transmission et un bon traitement de la déclaration. Cette procédure unique doit être communiquée à l’ensemble des structures concernées sur le territoire.

12. Créer un observatoire national de la maltraitance

A l’instar de l’Observatoire National de la Protection de l’Enfance (ONPE), créer un observatoire national de la maltraitance dans le secteur de l’autonomie. Une bonne connaissance des faits est indispensable pour évaluer et adapter les politiques et notamment améliorer la prévention des risques, tant pour les personnes accompagnées que pour les professionnels.

13. Etendre les outils d’accompagnements relatifs à la gestion de la maltraitance et à la promotion de la bientraitance à l’ensemble des structures sociales et médico-sociales

Pour cela, la Haute Autorité de Santé conjointement avec la Direction Générale de la Cohésion Sociale (DGCS) devra proposer des guides et recommandations de bonnes pratiques concernant l’ensemble du secteur et des structures, par type de structure (établissement ou service) et par champ (social ou médicosocial), afin de renforcer les connaissances et la professionnalisation de tous les intervenants au sein du secteur.

14. Favoriser l’expression des personnes accompagnées

Cette mesure peut s’organiser via la mise en place d’un espace de parole tripartite où bénévoles, salariés et usagers peuvent échanger sur les pratiques des professionnels, amenant à repérer des situations pouvant être problématiques et prévenir de la maltraitance ordinaire, qu’elle soit institutionnelle ou liée à des individus.

15. Disposer d’une structure d’aide, d’accompagnement et d’appui à la démarche qualité et à la gestion des risques pour les services autonomie à domicile

Pour cela, étendre le rôle des Structures Régionales d’Appui (SRA) à l’accompagnement des structures sociales (établissements et services) et plus seulement aux structures sanitaires et médico-sociales. En effet, dans le cadre de la gestion des évènements indésirables et notamment de la lutte contre la maltraitance, les SRA viennent en appui aux structures pour les accompagner dans l’analyse des situations déclarées et la mise en place d’actions correctives. Elles sont également un soutien pour la réalisation d’analyses des causes, via un appui méthodologique. Réel appui opérationnel pour les acteurs terrains, le périmètre des Structures Régionales d’Appui doit également comprendre l’accompagnement des structures d’aide à domicile et développer une connaissance de leur fonctionnement.

Pilier 4 : Métiers

16. Revaloriser les salaires des professionnels de la branche de l’aide à domicile

27 propositions de l'ADMR pour bien-vieillir en France, Pilier 4

Malgré l’entrée en vigueur de l’avenant 43 à la Convention collective nationale de la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile (CCN BAD), le 1er octobre 2021, certaines catégories de salariés voient leurs rémunérations rattrapées par le SMIC, remettant en cause les efforts des partenaires sociaux de la branche en faveur de l’attractivité de ces métiers essentiels. Ce rattrapage est notamment dû au fait que l’agrément ministériel nécessaire à l’opposabilité aux financeurs publics des accords collectifs est soumis à un taux d’évolution annuel, taux qui est fixé sans tenir compte des évolutions du SMIC. Il apparaît essentiel de donner aux partenaires sociaux les moyens d’une véritable politique salariale annuelle pour mettre fin à la paupérisation des salariés du secteur, en fixant le taux d’évolution de la masse salariale à un niveau au moins équivalent à l’évolution du SMIC, sans remettre en cause le principe d’agrément et d’opposabilité aux financeurs et ce en maintenant une CCN BAD garantissant les spécificités du domicile.

17. Favoriser la mobilité par le soutien à l’acquisition de véhicules de service

Le métier d’aide à domicile, notamment en milieu rural, nécessite l’utilisation d’un véhicule. En moyenne, un salarié de l’ADMR parcourt 4 500 kilomètres par an, majoritairement avec son véhicule personnel. Les départements participent au financement des frais kilométriques via les employeurs de l’aide à domicile. Les associations investissent dans la mobilité via l’acquisition de flottes automobiles pour les salariés d’intervention, favorisant ainsi le recrutement et la fidélisation des salariés. Cela nécessite un effort financier de la part de l’employeur. Le soutien à ce type d’investissement par les organismes de tutelles (CD/ARS) nous parait nécessaire au développement de l’acquisition de flottes de voitures au sein des services autonomie à domicile. L’ADMR compte aujourd’hui environ 10 000 véhicules. L’investissement doit se faire également autour d’équipement en bornes électriques en milieu rural afin de favoriser le déploiement de véhicules propres.

18. Outiller les intervenants à domicile de cartes professionnelles

En effet, comme le préconise la proposition de loi visée plus haut, cette carte apparaît comme indispensable pour faciliter les conditions d’intervention au quotidien de nos professionnels. Elle serait un levier important de reconnaissance de leur travail, et une solution à certaines difficultés rencontrées (stationnement, pompes à essence…).

19. Soutenir le développement des « Ã©quipes solidaires de proximité »

Une organisation innovante du travail des intervenants à domicile est testée par l’ADMR à titre expérimental. Les intervenants à domicile sont organisés en équipe, composée de 4 à 8 membres environ. Il s’agit d’un cadre de délégation clair et flexible qui est construit avec chaque équipe. L’équipe bénéficie d’une relative autonomie pour organiser ses plannings et prendre des décisions pour améliorer la prise en charge des personnes accompagnées.

Ce type d’organisation permet notamment :

  • Une meilleure qualité de vie au travail
  • Une réponse aux difficultés de recrutement, de turnover et d’absentéisme
  • Une amélioration de la prise en charge de nos bénéficiaires

20. Valoriser le rôle, les missions et l’engagement des bénévoles

20.1. En facilitant l’engagement bénévole des actifs à travers la création d’un “congé engagement social“ et en développant le mécénat de compétence

En effet les salariés disposent de peu de temps pour s’engager bénévolement au quotidien. Bien souvent, ils doivent consommer leurs congés pour se rendre disponible pour des associations du secteur social et médico-social et ce parfois au détriment de leur famille.

20.2. En finançant la formation et l’accompagnement des bénévoles de gouvernance et acteurs d’innovation sociale

En effet, l’engagement bénévole au niveau des gouvernances des associations (locales, départementales, nationales) nécessite l’acquisition de compétences, notamment en termes de capacité de conceptualisation de projets participant à l’innovation sociale, mais aussi en termes de stratégie et de négociation. Le financement de la formation doit se faire à des coûts réalistes et le taux de financement pourrait être relevé significativement (80 à 90 % des coûts pédagogiques par exemple).

De plus, la charge et la complexité grandissante du secteur nécessitent un soutien technique. Le financement d’animateurs/accompagnants dédiés contribuerait au maintien et au développement de l’engagement bénévole au sein des associations du secteur social et médico-social.

20.3. Renforcer la reconnaissance de l’activité bénévole dans la validation des acquis de l’expérience

L’engagement au sein des associations du secteur social et médico-social permet d’acquérir des compétences. Pour faciliter un bénévolat par des actifs, il conviendrait que ces compétences acquises au fil du temps puissent être mieux valorisées (comme une activité professionnelle par exemple) dans la validation des acquis de l’expérience.

Pilier 5 : Financement

21. Augmenter la part des financements de la branche autonomie dédiée à l’accompagnement et au soin des personnes à domicile

27 propositions de l'ADMR pour bien-vieillir en France, Pilier 5

La création de la branche « Autonomie » de la sécurité sociale, dont la gestion a été confiée à la CNSA, constitue une véritable avancée et répond à une revendication des fédérations du secteur. Pour autant, alors qu’une très large majorité des personnes âgées en perte d’autonomie ou en situation de handicap vit et souhaite continuer à vivre à domicile, la branche autonomie ne consacre que 17 % de son budget au financement de l’accompagnement, de l’aide et des soins à domicile. Le coût du “Domicile” repose donc essentiellement sur les collectivités locales et les personnes accompagnées elles-mêmes.

22. Apporter un soutien financier de l’état aux départements faisant le choix de tarifer les services autonomie à domicile

Malgré un soutien de l’État plus important pour le financement des services d’aide et d’accompagnement à domicile (tarif socle, avenant 43 et dotation complémentaire), nous constatons actuellement une volonté de plus en plus affirmée de la part des conseils départementaux de ne plus tarifer les services habilités à l’aide sociale. Cette tendance représente un risque important. Elle conduirait les services à perdre l’opposabilité de la CCN BAD auprès de leur financeur. Par conséquent ils seraient contraints d’appliquer un reste à charge aux bénéficiaires de plus en plus important. Pour soutenir les départements souhaitant préserver le modèle d’une tarification administrative, nous proposons que l’État, par l’intermédiaire de la CNSA, augmente le niveau de financements qu’il leur apporte.

23. Réformer et uniformiser les modes de financement des services autonomie à domicile via un financement par dotation globale

Dans le cadre de la réforme des services autonomie à domicile, qui impose un rapprochement entre les SSIAD et les SAAD, il est nécessaire de mettre en cohérence les différents modes de financement. A compter de cette année, les SSIAD seront soumis à un nouveau système de tarification, dans lequel ils se verront attribuer un forfait structure et un forfait soin (en fonction du type de prise en charge des bénéficiaires). Parallèlement, les SAAD continueront de fonctionner sur un système de tarification horaire et de dotation complémentaire (3€ par heure en moyenne). Alors même que les nouveaux services autonomie mixtes, à terme, deviendront une entité morale unique, il est nécessaire d’homogénéiser les modes de financement en mettant en place une dotation structure unique pour la personne morale et deux dotations, l’une dédiée au soin, et l’autre à l’aide (sous forme de dotation globale). Ce principe de financement par dotation permettra de réduire le reste à charge des personnes accompagnées, mais également de financer :

23.1. L’extension de l’enveloppe et le périmètre d’application de la dotation de coordination

Ce financement supplémentaire destiné aux SPASAD (Services polyvalents d’aide et de soins à domicile), qui deviendront prochainement des SAD mixtes, vise à garantir le fonctionnement intégré de la structure et la cohérence de ses interventions auprès de la personne accompagnée. L’ambition de cette dotation doit être étendue, en termes de moyens et de périmètre. Elle semble par exemple tout indiquée pour financer, à terme, les postes de coordinateurs de parcours/responsables de la coordination localisés au sein de ces services.

23.2. Les actions de prévention réalisées par les services autonomie à domicile

Les professionnels de nos services consacrent déjà du temps à la prévention auprès des personnes qu’ils accompagnent. Les textes réglementaires relatifs aux services autonomie à domicile reconnaissent et appuient cette mission. Or, elle ne fait à ce jour l’objet d’aucun financement spécifique et pérenne (hors dotation complémentaire des conseils départementaux et financements complémentaires des agences régionales de santé).

23.3. Les surcoûts de l’évaluation pour les ESSMS du fait des nouvelles modalités d’évaluation

La restructuration du marché des organismes évaluateurs liée à l’exigence de l’habilitation par le Comité français d’accréditation (COFRAC), la mobilisation des professionnels sur une durée plus importante et la fréquence plus élevée d’évaluation sont autant de modalités augmentant le coût actuel des évaluations et fragilisant encore plus l’équilibre financier de nos structures.

23.4. Les heures dites “improductives“ pour favoriser les temps d’échanges et d’analyses en équipe

D’après le rapport de l’IGAS d’octobre 2010, les heures improductives sont toutes les heures rémunérées aux salariés qui ne sont pas réalisées sur le terrain auprès des usagers et représentent en moyenne 25 % du total des heures rémunérées. Les temps d’analyse de la pratique, d’analyse des causes d’un évènement indésirable ou les groupes de travail pour la mise à jour des projets d’établissements sont actuellement considérées comme des heures improductives. Or, au vu des exigences réglementaires liées au nouveau cahier des charges des services autonomie à domicile ou celles présentes dans le nouveau référentiel d’évaluation de la Haute Autorité de Santé, ces temps indispensables sont amenés à se multiplier pour alimenter notamment une réflexion collective favorisant un accompagnement de parcours.

24. Faire évoluer le système d’autorisation par place des SSIAD afin de répondre à l’ensemble des besoins en soins à domicile

Le système actuel d’organisation de l’offre de soins infirmiers à domicile repose sur l’attribution de places, délivrées aux services par les ARS. Le nombre de places attribuées à chaque service est précisé dans l’arrêté d’autorisation. Or, ce système conduit à freiner, dans certain cas, la prise en charge des personnes. En effet, si toutes les places du SSIAD sont occupées, il se retrouve donc dans l’incapacité d’apporter des soins à domicile pour de nouvelles personnes.
Si le SSIAD est le seul à intervenir sur la zone géographique concernée, les patients sont ainsi contraints de se rapprocher d’infirmiers libéraux qui n’ont pas toujours la possibilité de réaliser des soins d’hygiène et de confort (soins principalement réalisés par les SSIAD).

Un système d’organisation plus souple permettrait à chaque SSIAD d’apporter des soins à domicile à un nombre non limité de patients, si le montant de sa dotation le permet. Une régularisation de sa dotation au cours de l’année, en cas d’accroissement de son activité, pourrait être proposée.

25. Rendre opposables les conventions collectives lorsque le CPOM est obligatoire pour tous les services

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a créé un principe d’inopposabilité des conventions collectives, lorsqu’un Contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) obligatoire est signé. Cette mesure n’avait pas manqué d’être contestée par les fédérations du secteur, dans la mesure où elle conduit à mettre fin aux garanties conventionnelles qui protègent les salariés et permettent des avancées importantes (par exemple, l’avenant 43 à la CCN BAD ayant permis une revalorisation des salaires des professionnels).

Une inversion de la disposition prise en 2018 paraît indispensable, le contexte actuel illustrant la nécessité de la mesure. En effet, de nombreux départements ont tardé à appliquer l’avenant 43 précédemment visé et certains ont d’ailleurs fait le choix de ne pas l’appliquer du tout. Alors que les CPOM ont vocation à se généraliser, une sécurisation des services sur ce point est essentielle.

Pilier 6 : Numérique

26. Permettre un accès au numérique pour tous

27 propositions de l'ADMR pour bien-vieillir en France, Pilier 6

Dissocier le numérique de l’accompagnement à domicile est aujourd’hui devenu une mission impossible. Poussée d’une part par les pouvoirs publics qui encouragent les personnes à prendre leur santé en main au travers de leur “Mon Espace Santé” et d’autre part, des professionnels eux-mêmes sur-équipés d’outils et de solutions numériques, l’accès aux services numériques est donc devenu une fonction vitale.

Dès lors et pour éviter d’entretenir indéfiniment la fracture numérique (le temps d’installer la fibre optique sur le territoire national sera long), le recours à des connexions satellites faciliterait de toute évidence un accès au numérique pour tous. La création d’un forfait ou d’une subvention pour tout usager en zone dite “blanche“ serait alors impérative.

27. Permettre un accès à des informations pour appréhender les outils du numérique notamment en ouvrant le CPF à des formations dédiées au numérique

Si l’on souhaite créer un cercle vertueux dans le circuit de l’information numérique partagée entre les professionnels et les usagers, il faut d’ores et déjà favoriser les usages du numérique pour tous les professionnels. Cette transformation s’accompagne inévitablement de formations ciblées et adaptées aux personnels de l’aide à domicile. Adapter les formations à cette population est indispensable lorsque l’on connait les contraintes d’horaire et de mobilité que les aides à domicile connaissent. C’est pour cela que ces formations doivent être réalisées dans des formats courts et efficaces sur les usages du numérique et par ailleurs consommables au travers du compte personnel de formation (CPF), qui pourrait être dédié à ce type de formation. C’est en accompagnant les aides à domicile au moyen de ce compte et d’un programme (pourquoi pas certifiant) que nous réussirons la transformation du secteur et son virage vers le numérique en santé.


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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